Les Brigands

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Les Brigands Opéra-bouffe en trois actes Livret de censure Paris 1869 – Première édition provisoire –

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Les BrigandsOpéra-bouffe en trois actes

Livret de censureParis 1869

– Première édition provisoire –

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Les Brigands – Livret de Censure (1869) 1

©2005 Boosey & Hawkes · Bote & Bock, Berlin. Alle Rechte vorbehalten.

Pour être joué au théâtre des variétés5 novembre 1869

10,245_____

5 9bre 1869

Les Brigands

opéra bouffe en 3 actes

__________________

Personnages Acteurs

Falsacappa, Chef de brigandsPietro, son confidentiel sous chefLe Prince de MantoueBarbavano brigandDomino "Carmagnola "La baron de Campotasso 1er écuyer du PrinceLe Cte. de Gloria Cassis, chambellan du Psse. de GrenadeLe chef des carabiniers, du prince de MantouePipo, aubergisteFiorella, fille de FalsacappaFragoletto, jeune fermierLa Princesse de GrenadeFiametta paysanneZerlina "Bianca "Cicinella "La DuchesseLa Marquise

Acte 1er______

Un site d’une sauvagerie étrange (paysage à laSalvator ) d’énormes rochers. Au fond, uneforêt. Chemin escarpé tracé au milieu des rochers. Agauche l’entrée d’un souterrain.

_____ Scène 1e _____

Domino, Barbavano, Carmognola Brigands, puisFalsacappa, Pietro Paysannes

On entend 3 fois le son du canon cor

Domino, seul en scène, il est en sentinelleLe cor de la montagne, a retenti trois fois,Alerte, mes amis, accourez à ma voix

(Entrent 5 ou 6 brigands)

BarbavanoQui vive ?

Voix au dehorsLes brigands !

BarbavanoDites le mot de passe

Les voix, au dehorsEscopette et mousquets ! pistolets et tromblons

DominoSentinelle, faites leur placeLaissez-les approchez, les hardis compagnons.

Entrée des brigands

ChœurDeux par deux, ou bien trois par trois,Quatre par quatre quelquefois,Ils arrivent, marchant dans l’ombre,Les brigands de la forêt sombre

(Entre Carmagnola)

DominoCarmagnola !

CarmagnolaSilence cachez-vous

DominoPourquoi ?

CarmagnolaDisparaissez !

BarbavanoCommence par nous dire

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CarmagnolaJe ne vous dirai rien, si vous aimez à rireCachez-vous !

DominoCachons-nous !

même Chœur, à voix basseDeux par deux, ou bien trois par troisQuatre par quatre quelquefoisEn sourdine ils rentrent dans l’ombreLes brigands de la forêt sombre

Les brigands se cachent derrière les rochers. A peinesont-ils cachés que parait un ermite vénérable(costume des capucins ) suivi d’une demidouzaine de paysannes

FiamettaDéjà depuis une grande heureBon ermite, nous te suivons (bis)Oui nous te suivonsEt pourtant, ta sainte demeurePoint encor ne l’apercevonsBon ErmiteBon ermite, où nous conduis-tu ?Ou nous conduis tu ?

L’ErmiteDans les sentiers de la vertu

RepriseToutes les femmesAh ! dis-nous viteEtc.

ZerlinaC’est un joli sentier sans douteEt qu’il est doux de parcourir (bis)

ToutesBien doux de parcourir

ZerlinaMais hélas ! bien longue est la routeNe la verron-nous point finir ?Ah ! dis-nous viteBon ermiteBon ermite, ou nous conduis-tu ?Ou nous conduis-tu ?

L’ErmiteDans le sentier de la vertu

BiancaN’arriverons-nous pas ?

L’Ermite Falsacappa d’une voix troubléeNous sommes arrivés(Il rejette son capuchon et parait en chef de brigands

Les femmesFalsacappa !

CicinellaNos amants sont flambés

FalsacappaOui, c’est moi, c’est Falsacappa !On ne s’attendait pas à ça

(Tous les brigands envahissent la scène et entourentles paysannes)

TousFalsacappa !

FalsacappaCouplets1Quel est celui qui par les plainesConduit sa bande de luronsCelui qui commet par douzainesDes forfaits dans les environsFalsacappaVers le voyageur qui s’avanceIl se glisse, puis il s’élanceEt le voyageur mécontentC’est Ernesto Falsacappa !

TousFalsacappa !

FalsacappaQuel est celui qui porte aux femmesUn culte tout particulierFalsacappa !Et fait toujours devant les damesFléchir la rigueur du métierFalsacappa !Vers la beauté, vers l’innocenceIl se glisse, puis il s’élanceIl parle et l’innocente enfantChancelle et tombe en répétantC’est Ernesto Falsacappa

TousFalsacappa !

FalsacappaCet homme étonnant le voilàC’est Ernesto Falsacappa !

TousC’est Ernesto Falsacappa !Vive Falsacappa

Les femmesQuoi c’est Falsacappa

FalsacappaPoint de frayeurEn douceur

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Tout se passera mes bellesEt maintenant presto

Chœur des brigandsCes mignonnesQue voilàCes friponnesQui sont làO maître tu nous les donnes

FalsacappaHalte là !

Le ChœurPourquoi ça ?

FalsacappaConduisez-les d’abord dans le souterrain noirEt qu’on ait des égards, au moins jusqu’à ce soir

Les BrigandsJusqu’à ce soirQuel espoir

FalsacappaEt maintenant, presto, presto,Eloignez-vous tous subitoTous excepté les 3 brigandsQui sont mes premiers lieutenants

ChœurEt maintenant presto, prestoEloignons-nous tous subitoTous excepté les trois brigandsQui sont ses premiers lieutenants

Chœur des femmes

Tous sortent excepté Falsacappa, Pietro, Domino etCarmagnola

_____ Scène 2e _____

Falsacappa, Pietro, Barbavano, Domino,Carmagnola

FalsacappaMais où donc est Pietro, mon fidèle lieutenant

PietroMe voici, chef me voici. J’arrive aussi vite que mesvieilles jambes.

Falsacappa, regardant par l’entrée du souterrainRegarde-les un peu … regarde les … voilà ce qu’ilfaut pour les conduire … des femmes et des liqueursfortes

PietroTes paroles sont amères

Falsacappa

Je méprise les hommes

PietroNe fais-tu pas d’exception ?

FalsacappaUne seule …

Pietro, avec émotionLaquelle ?

FalsacappaToi mon bon Pietro

PietroAh !

(Ils s’embrassent avec effusion)

FalsacappaToi qui m’a appris le métier … Toi qui prenant laplace d’un père pendu avant l’âge, j’avais trois ansalors, et cette mort tu sais que je jurai de la venger etque je tiens mon serment … Toi, dis-je qui prenantla place de mon père, fut le guide de ma jeunesse etme conservas le commandement de cette bande quiétait mon héritage. L’occasion était belle cependantla tentation aurait pu te venir d’exploiter det’emparer du pouvoir et d’exploiter pour ton compte.Tu n’en fis rien … honnête Pietro.

PietroOh ! je me rends justice, je ne suis pas un homme dehaut vol

FalsacappaQue veux-tu dire ?

PietroJe ne suis pas fait pour le 1er rang commandement.Je suis fait pour tenir auprès de toi l’emploi deconfident et pour t’admirer … que me faut-il à moi ?que tu me regardes de temps à autre … l’air ému …le regard humide en me disant …

FalsacappaMon vieux canard !

PietroCela me suffit à moi

(Murmures)

FalsacappaQu’est-ce ?

Pietro, basMais d’autres peut être trouvent que cela ne leursuffit pas

FalsacappaQue veux-tu dire ?

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Pietro, montrant les brigandsCes messieurs, je crois, ont l’intention de t’adresserquelques observations

FalsacappaDe l’indiscipline ? Du mécontentement ?

PietroJ’en ai peur …

FalsacappaNous allons voir ça … approchez messieurs laséance est ouverte. Qui est-ce qui demande laparole ?

BarbavanoJe la prends

FalsacappaGardez-là

BarbavanoJe vous remercie, chef, et je vous engage à ne pasperdre un mot de ce que je vais avoir l’honneur devous dire. Nous ne sommes pas contents.

FalsacappaMessieurs

Tous les troisNous ne sommes pas contents

BarbavanoNos affaires ne vont pas …

DominoIl y a huit jours, vous nous avez fait faire 30 lieues,et passer 24 heures dans une cave …

CarmagnolaPourquoi faire ? … Pour voler 17 francs !

BarbavanoQu’il a fallu partager entre 73 personnes …

CarmagnolaEt vous avez pris dix francs pour vous !

BarbavanoLes affaires ne vont pas, nos dividendes sontdérisoires … j’étais banquier, moi, je me suis faitvoleur parce que j’espérais qu’il y aurait moins detravail et plus de bénéfices … c’est le contraire quiest arrivé …

DominoJadis les autres bandes nous portaient envie,maintenant les autres bandes se fichent de nous

CarmagnolaNous ne sommes plus la première bande du monde

Barbavano DominoEt à qui la faute ?

DominoPas à nous, puisque nous ne faisons qu’obéir

FalsacappaA moi alors ?

BarbavanoMais … oui … à vous !

FalsacappaMessieurs …

CarmagnolaIl est incontestable que depuis quelque temps tagestion n’a pas été brillante …

FalsacappaJ’ai été malheureux …

CarmagnolaC’est ce qu’on te reproche

FalsacappaJe ne m’attendais pas à cela de votre part … ne vousai-je pas procuré un tas de douceurs tout à l’heureencore j’ai amené des femmes

BarbavanoConnu … Les appétits matériels … Le système n’estpas mauvais … mais il commence à avoir fait sontemps ; maintenant il nous faut autre chose

FalsacappaQu’est-ce que vous demandez à la fin ?

CarmagnolaOn vous demande tout uniment … de vous réveillerun brin d’avoir une idée et de trouver quelque boncoup à faire

FalsacappaQu’est-ce que tu penses de ça, toi ?

PietroPromettez leur quelque chose

FalsacappaC’est ça je vais leur promettre quelque chose.Ecoutez-moi, mes fidèles lieutenants je vouspromets … vous entendez … Je vous promets …Enfin c’est bon vous voulez qu’on ait une idée, onen aura une …

TousBien vrai ?

FalsacappaParole d’honneur !

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BarbavanoJurez sur autre chose

(On entend la voix de Fiorella)

FalsacappaSur la tête de ma fille dont les accents se fontentendre au loin dans la montagne

CarmagnolaSur la tête de ta fille Fiorella

FalsacappaOui, sur la tête de ma fille Fiorella je jure que d’ici àpeu de temps je ferai faire à la bande une opérationfructueuse …

Tous les troisA la bonne heure ! … (Ils vont au devant deFiorella)

Pietro, basEst-ce que vraiment tu as quelque chose en tête ?

Falsacappa, basMoi, pas du tout …

Pietro, basMais alors pour tenir ta promesse sur quoi donccomptes-tu ?

Falsacappa, basSur les événements !

(Entre Fiorella. Chapeau pointu. Carabine surl’épaule)

Tout le mondeLa voilà … la voilà … la belle Fiorella

_____ Scène 3e _____

Les Mêmes, Fiorella

Elle entre du fond descendant par un sentier tracédans les rochers

Fiorella1Au chapeau je porte une aigretteUne croix d’or au couSur l’épaule mon escopetteUn poignard au genouEt quand tous les brigands sommeillentDans les rocs que voilàCe sont mes deux yeux noirs qui veillentSur la bande à papaUn fusil brille au clair de lunePuis un coup retentitPan, pan, c’est Fiorella la bruneLa fille du bandit

Je suis la fille du bandit~~~~~

ChœurC’est Fiorella la bruneLa fille du bandit

2Je sais courir de roche en rocheComme un chamois légerEt mon cœur bondit quand approcheLe moment du dangerCette main fluette et légèreA des muscles d’acierElle a couché dans la poussièrePlus d’un carabinierUn fusil brille au clair de lunePuis un coup retentitPan, pan(Elle tire 2 coups de fusil)C’est Fiorella la bruneLa fille du bandit !Je suis la fille du bandit !

FalsacappaMa fille …

FiorellaMon bon père …

FalsacappaLa séance est levée, messieurs, je n’ai pas besoin devous recommander de ne pas oublier ma promesse,moi non plus je ne l’oublierai pas … L’occasion dela tenir ne se fera pas attendre. Le prochain mariagede la princesse de Grenade avec notre jeunesouverain, le duc de Mantoue, est officiellementannoncé … vous le savez …

BarbavanoNous le savons …

FalsacappaA l’occasion de ce mariage il y aura des fêtes …Peut-être oubliera-t-on de nous y inviter ? … maiscela ne fait rien, nous y serons … je n’ai pas autrechose à vous dire, nous serons à ce mariage. Bonjourmessieurs

PietroVive Falsacappa !

Carmagnola, aux autresFaut-il crier ?

Domino, basBah ! Crions encore cette fois-ci

TousVive Falsacappa

Falsacappa

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C’est bien messieurs … c’est bien … Croyez bienque l’émotion … la reconnaissance … Bonjour,messieurs, bonjour …

Tous, en sortantVive Falsacappa !

_____ Scène 4e _____

Fiorella, Pietro, Falsacappa

Fiorella, à PietroTu ne lui as rien dit, au moins ?

Pietro, bas à FiorellaPas si bête …

Falsacappa, après avoir reconduit les 3 brigandsLa famille, maintenant, de la famille

FiorellaMon bon père …

FalsacappaMa fille … (Pietro et Fiorella se font des signes enriant à part) Je sais bien que c’est aujourd’hui la StErnest … le jour de ma fête … mais je feins de nepas me rappeler … pour leur laisser le plaisir de mefaire une surprise … (haut à Pietro qui rit en leregardant) Comme elle belle ma fille, comme elle estgrande

PietroEst-ce que tu ne t’es pas dit quelquefois que celaétait extraordinaire d’avoir à ton âge une fille aussigrande …

FalsacappaJe me le suis dit quelquefois … mais nous autresnous vivons tellement en dehors des loisordinaires …

PietroC’est vrai …

FalsacappaEt puis, j’ai pensé qu’avertis par le trépas prématuréde mon père, et redoutant pour moi un sort pareil,ceux qui veillaient sur ma jeunesse m’avaient mariétrès jeune. Cela expliquerait tout …

Pietro, en riantEn effet cela expliquerait tout (signes entre Fiorellaet Pietro)

Falsacappa, à partIls ne savent comment faire pour me surprendre …c’est délicieux ! Joies paisibles de l’innocence, quevous êtes douces au cœur des coupables

FiorellaPetit papa …

Falsacappa, s’oubliantC’est aujourd’hui ta … (s’interrompant) Quoi doncma fille ?

FiorellaQuel jour sommes-nous ?

Falsacappa, feignant l’ignoranceMais, je ne sais pas …

FiorellaC’est aujourd’hui la St Ernest, ô mon bon père …

Falsacappa, même jeuEst-il possible ?

FiorellaLe jour de votre fête et ce jour … le vieux Pietro etmoi, n’avons pas voulu le laisser passer sans vousapporter un petit présent

FalsacappaAh ! bien ; par exemple … si je m’attendais ! … Mafille, mon vieux Pietro. Et où est-il ce présent ?

FiorellaLe voilà mon bon père (Elle met un coffret dans lesmains de son père. Falsacappa ouvre et un petitdiable sortant vivement du coffret saute au nez deFalsacappa)

FalsacappaQu’est-ce que c’est que ça ?

PietroÇa … c’est une petite farce … Elle est de moi, lapetite farce

Fiorella, avec émotionIl y a autre chose mon bon père

FalsacappaEn effet … Ton portait Fiorella … ton portait. ah !par exemple, ma fille, je suis surpris, et pour tout debon. je m’attendais à une paire de bretelles

FiorellaMon bon père …

FalsacappaUn portait et en costume court encore

FiorellaComment en costume court

FalsacappaEn costume de cour, je veux dire … Tu as l’aird’une marquise la dessus. Et comment l’as-tu faitfaire ce portait ?

Fiorella

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Tous les jours, la figure bien enveloppée j’allaischez le peintre à la mode. Pietro m’accompagnaitdéguisé en domestique de bonne maison

PietroSi tu m’avais vu … tu aurais ri … j’avais uneboule …

FalsacappaEt vous avez payé ? …

PietroEn bon argent …

FalsacappaEn bon argent ! …

PietroComme j’ai l’honneur de te le dire seulement

FalsacappaSeulement !

PietroJ’ai remarqué que la dame qui venait poser avantnous, se faisait peindre avec ses diamants … unesoubrette … assez piquante, ma foi, apportait lesdiamants et les remportait, hier nous sommes arrivésun peu en avance et …

FalsacappaEt …

PietroEt ce sont les diamants de la dame qui encadrent simerveilleusement le portait de Fiorella

FalsacappaTrès bien, vieux Pietro, voilà un bon tour (a Fiorella)Pourquoi ne souris-tu pas ma fille ? Quand un desnôtres a fait quelque chose de bien, il est convenablede l’encourager par un sourire. Ça excite le zèle et çane coute rien

FiorellaPardonnez-moi, mon père …

FalsacappaTa figure tout d’un coup est devenue sérieuse …

FiorellaVous vous en êtes aperçue ?

FalsacappaEt je te prie de m’expliquer ce changement dephysionomie

FiorellaA Dieu ne plaise que je veuille juger votre conduite.Vous continuez l’état glorieusement exercé par votrepère … il n’y a rien de plus respectable, et il seraitbon que cet exemple fut suivi plus souvent … Je suis

fière d’être votre fille, j’aimerais à voler sur vostraces … et cependant … depuis quelque temps aumoins, je suis toute surprise de sentir en moi deshésitations, des scrupules

FalsacappaDepuis quelque temps, dis-tu ! Quel jour cela t’a-t-ilpris pour la première fois ?

FiorellaLe jour de cette visite que nous avons faite ensemblechez ce jeune fermier … vous savez bien …

FalsacappaA nous, Pietro, le répertoire quel jeune fermier ?

Pietro, consultant un carnetFragoletto, jeune fermier aisé. C’est mercredidernier que vous lui avez rendu cette visite

FiorellaVainement, pendant que vous mettiez cette maisonau pillage, vous me pressiez de m’unir à vos travauxdans la mesure de mes forces et de mon intelligence,je suis restée immobile … les yeux attachés sur cejeune homme … c’était plus fort que moi. J’ai tortpeut être de vous faire cet aveu, mon bon père …

FalsacappaNon, ma fille bien aimée … Il faut espérer que celapassera … Je tiendrai compte, cependant, de ce quetu me dis, et je ne t’emploierai que dans lescirconstances où il faudra de la grâce et de ladélicatesse

FiorellaMerci, mon père, vous êtes bon (à Pietro) Il est bon

PietroUn peu trop gobichonneur, mais à cela près, le roides hommes

Brouhaha au dehors. Cris

Domino, en dehorsAlerte ! alerte ! nous le tenons

_____ Scène 4 bis _____

Les Mêmes, Fragoletto amené par Domino, suivi partous les autres Brigands

ChœurFragoletto est amené par les brigandsNous avons pris ce petit hommeIl est tout petit, mais en sommeQuoique petit, il est fort bienEt ça vaut encor mieux que rien

Fragoletto

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Tu as des hommes qui font du zèle. Ils se sont donnébien du mal pour amener ici un bon jeune hommequi venait de lui même

FalsacappaTu dis que tu venais ici

FragolettoDe moi-même et de mon propre mouvement

FalsacappaPourquoi faire ?

FragolettoPour te parler, chef, pour te parler

FalsacappaQui donc es-tu ?

FragolettoTu ne me reconnais pas, moi, je te reconnais bien …et cependant si l’un de nous deux devait reconnaîtrel’autre … Lorsque nous nous sommes vus pour lapremière fois tu étais déguisé, toi, tandis que moi,j’avais comme aujourd’hui l’honnête figure que j’aireçu du ciel …

FalsacappaJ’étais déguisé ? …

FragolettoOui, en vieux mendiant … vieux matin … et cettejeune fille t’accompagnait

Pietro, éclatant de rireAh ! j’y suis

FalsacappaQuoi donc ?

PietroC’est le jeune fermier de mercredi dernier

FragolettoAllons donc ! Vous y avez mis le temps

FalsacappaNous voyons tant le monde

FiorellaJe l’avais reconnu tout de suite, moi !

FragolettoVous êtes venu frapper à ma porte en me demandantun abri

FalsacappaEt tu viens te plaindre peut-être

FragolettoCertes, je viens me plaindre mais pas de toi

FalsacappaEt de qui donc ?

FragolettoD’elle

FiorellaDe moi !

FalsacappaDe ma fille ?

FragolettoDe ta fille

1er Couplet_________

Pendant que tu faisais main basseSur mon modeste mobilierAllant de mon armoire à glaceAu meuble le plus familierTa fille occupée à t’attendreObservait ça d’un air reveurElle avait l’air de ne rien prendreElle prenait mon cœur

2e Couplet________

Eh bien, garde tout, je te laisseMa huche au pain et mon dressoirMes moutons à la laine épaisseEt mes grands bœufs tachés de noir(à Fiorella)Je laisse à Monsieur votre pèreCes biens conquis par sa valeurMais vous, vous me rendrez, j’espèreVous me rendrez mon cœur_____

FiorellaAh ! ça mais sauf erreur, c’est une déclaration

PietroÇa en a tout l’air

FalsacappaUne déclaration à ma fille …

FragolettoPourquoi te facher, chef. Un jeune homme a bien ledroit de faire une declaration à une jeune fille,lorsque ses intentions sont pures à ce jeune homme

FalsacappaAh ! tes intentions sont ? …

FragolettoComme le regard de ta fille. C’est sa main que jeviens te demander …

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FiorellaTout de suite, papa, tout de suite

FalsacappaQu’est-ce que c’est … la main de ma fille à un …

FragolettoA un honnête homme, n’est-ce pas ? c’est une idéequi ne t’entre pas dans la cervelle … attends donc,chef, attends donc … je comprends tous les genresd’amour propre. Tu es un coquin, tu veux pourgendre un coquin

FragolettoQu’a cela ne tienne … je désire m’engager dans tabande

FalsacappaJeune présomptueux

FragolettoD’autant plus que c’est ce que j’ai de mieux à fairemaintenant, puisque tu as tout pris chez moi … ici,j’ai la chance de remettre peu a peu la main surtoutes mes petites affaires … (à un brigand) ainsi,monsieur vous, là bas, vous avez mes bretelles etmon chapeau … vous, jeune homme, vous avez mesbottes … c’est à dire vous en avez une … ladroite … où diable est donc la gauche ? … ah ! lavoilà ! à la bonne heure … ça fait la paire, vous lesavez un peu élargies, mais je les reconnais (à Pietro)Vous monsieur, je ne voudrais rien vous dire dedésagréable mais enfin … vous avez ma montre …je la reconnais à la ficelle

Pietro a une montre attachée à une ficelle

PietroMoi, ta montre …

FragolettoLà … (à Pietro qui veut remonter la montre) Ah ! tuauras beau la remettre à l’heure, ça sera toujours lamême chose

FalsacappaEh bien ! cette montre que je ne crains pas dequalifier de curieuse, je t’offre en même temps unmoyen de prouver que tu es digne d’être admisparmi nous

FragolettoEt quel est le moyen ?

FalsacappaTu vas voir

On apporte, attaché par une corde, à une sorte depoteau ou mannequin de grandeur naturelle,représentant un marquis de l’ancienne cour, toutcouvert de bijoux, de tabatières, de grelots, desonnettes etc

Chant

FalsacappaApportez le Marquis !

Fiorella et PietroApportez le Marquis ?

FragolettoQuel est donc ce Marquis ?

FalsacappaTu vas voir le Marquis

FragolettoLe Marquis ?

FiorellaLe Marquis

FalsacappaLe Marquis

ChœurLe voici, Monsieur le Marquis !Admirez comme il est bien mis !Comme il en a des tabatières,Des chevalières,Des diamants et des rubis !Admirez Mr le Marquis !

Falsacappa1Ta montre tu peux la reprendreJe la met ici, tu la vois,(Il met la montre dans le gousset du marquis)Donc il te suffira d’étendreLa main et d’ouvrir les cinq doigtsLa chose n’est pas difficileMais souviens-toi qu’un homme habileDoit s’emparer de son butinTin, tin, tinSans faire sonner le pantinTin, tin, tin

TousSans faire sonner le pantinTin, tin, tin

FalsacappaMontrant à Fragoletto les brigands qui l’un aprèsl’autre vont prendre quelque chose sur le mannequinsans faire remuer les sonnettesVois Carmagnola dit l’aimable,Barbavano, l’ancien banquier,Et Domino, le petit diable …Comme ils savent bien le métier !Vois maintenant, vois-moi, moi même,Admire mon adresse extrême.Il fait d’un tour de main sauter la culotte du marquis,qui reste en caleçon. Pas une sonnette ne bouge

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Comme je cueille mon butinTin, tin, tin

TousSans faire sonner la pantinTin, tin, tin

Falsacappapoussant Fragoletto vers le mannequin3A ton tour, maintenant, courage !En avant, mon jeune luron !Faites nous de la bonne ouvrage,Mais prenez garde au carillon.Il faut de la délicatesseDe l’œil, du sang froid, de l’adresse …Allons, prenez votre butinTin, tin, tinFragoletto veut prendre sa montreeffroyable carillonIl a fait sonner le pantinTin, tin, tin

TousIl a fait sonner le pantinTin, tin, tin

(On emporte le mannequin)

BarbavanoMoi, quand j’étais banquier, j’avais des actionnaires.Eh bien ! les actionnaires que j’ai eus, on pourraitmaintenant les prendre par les pieds et par la tête, etles secouer tant qu’on voudrait on ne les ferait passonner

Falsacappa, à FragolettoComme adresse, tu me parais jugé … as-tu du cœur,au moins

FragolettoJe suis venu ici tout seul … Il me semble que si celan’annonce pas un homme qui a froid aux yeux …

FalsacappaSuis moi donc. Et nous enfants, allons avant le repasdu soir, faire encore un tour dans la montagne. (àFragoletto) Je serai à coté de moi, mon gaillard, etnous verrons si ton mérite est à la hauteur de tonambition

FragolettoAllons, dans la montagne (Il s’approche de Fiorella)Mais vous, madelle vous a cause de qui j’ai priscette détermination qui peut avoir une certaineinfluence sur ma vie entière … ne me direz-vous pasun mot ?

FiorellaJe vous ai écouté. Jeune fermier

Fragoletto

Eh bien ?

FiorellaJe t’aime ! Je t’aime !

FragolettoAh !

FiorellaContente-toi de ça pour aujourd’hui

FalsacappaEn v’là assez. Vous allez venir avec nous, jeunehomme, ma fille, bien aimée, tu vas rester ici avecPietro, il te racontera l’histoire des bandits célèbres(mouvement de Fiorella) Le temps seulement defaire faire a monsieur ses premières armes et nousrentrons

FiorellaJe vous attends mon bon père

FalsacappaEn marche, compagnons. Nous allons nous poster làbas dans cette gorge de montagne

Pietro, à partGorge de montagne

Reprise du chœurSachez prendre votre butinEtc

_____ Scène 5e _____

Pietro, Fiorella

Pietro, rêveur à lui mêmeGorge de montagne

FiorellaA quoi songes-tu, bon vieillard ?

PietroJe songe qu’il y a dans la langue que nous parlonsdes expresions singulières … ainsi on dit une gorgede montagne … Pourquoi appelle-t-on une gorgeune chose creuse ? Il me semble à moi qu’on devraitdire au contraire …

Fiorella, l’arrêtantQu’est-ce que c’est ?

PietroPardon

FiorellaQue cela ne vous arrive plus … et comme vous l’adit mon père … racontez-moi quelque histoire devoleur

Pietro

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Volontiers. Il y avait une fois un grand financier

FiorellaEt puis après ?

PietroC’est tout

FiorellaOh ! oh ! bon vieillard … elle n’est pas de toi cettehistoire là

PietroNon, Melle, c’est une histoire que j’ai volée à MrVoltaire

Un jeune cavalier mis fort élégamment vientd’entrer. Fiorella se retourne et pousse un cri enl’apercevant

_____ Scène 6e _____

Les Mêmes, le Prince de Mantoue

FiorellaAh !

PietroQuoi donc ?

FiorellaLà … un jeune homme

Le PrinceTiens une jeune fille

Pietro, bas à FiorellaC’est vrai, ma foi, c’est un jeune homme et soncostume, à ce jeune homme annonce une certaineaisance… Ce collier, voyez-vous ce collier

Le PrinceJe vous en prie, ne pourriez-vous m’indiquer lechemin pour aller à la ville

PietroMon Dieu ! il serait assez difficile de vousexpliquer … si vous voulez, je vais aller vouschercher un guide

Le PrinceUn guide !

PietroOui, dans la montagne … je trouverai vite et je seraibientôt revenu

Le Prince, souriant et regardant FiorellaMais ne vous pressez pas trop, brave homme, nevous pressez pas trop

Fiorella, bas à Pietro

Que voulez-vous faire Pietro

Pietro, basCe que je veux faire … retrouver votre père etl’avertir qu’il y a ici un joli jeune homme àdévaliser … ah ! si j’avais encore ma vigueurd’autrefois … je n’irais chercher personne … maisavec mes vieux bras je ne peux pas … (haut auPrince qui se retourne) Je vais vous amener unguide, mon jeune seigneur (bas à Fiorella) Retenez-le, ne le laissez pas s’échapper

Le PrinceAllez ! brave homme, allez

PietroJ’y vais, Monseigneur, je vais aussi vite qu’il estpossible avec mes vieilles jambes

Il disparait dans les rochers

_____ Scène 7e _____

Le Prince Fiorella

FiorellaL’air un peu bébête, mais gentil et tout-a-l’heure …ah ! c’est dommage !

Le PrinceQu’est-ce que vous dites ?

FiorellaJe dis que cela est imprudent à vous de vouspromener ainsi dans la montagne avec cette grossechaîne d’or autour du cou

Le PrinceEt pourquoi ? imprudent ?

FiorellaMais parce que dans la montagne, on peutrencontrer … personne ne veille donc sur vous

Le PrinceMais, si fait … si fait … il y a même une foule degens qui veillent sur moi … c’est insupportable …voilà la première fois que je respire sans avoir autourde moi 50 personnes qui m’écoutent respirer …C’est ma 1ère heure de liberté et puis, autre chose,ma chère enfant, autre chose …

FiorellaQuoi donc ?

La PrinceJe ne te dirai pas que je ne sais pas ce que c’est queles femmes. Il y en a autour de moi des femmes …et qui me regardent avec des yeux

FiorellaVous allez vous taire

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Le PrinceJe vous assure … et quand j’ai l’air de distinguerune d’elle, il faut voir comment elle est heureuse,celle que j’ai l’air de distinguer …

FiorellaVous allez vous taire

Le PrinceEh bien, aucune de ces femmes n’est arrivée àproduire sur moi une impression pareille à celle quevous avez vous produite tout naturellement, sansvous donner du mal

FiorellaVoyez-vous ça …

Le PrinceD’abord tu es jolie, excessivement jolie, et puis tetrouver là … seule au milieu des rochers … avec tonpetit chapeau et ta plume rouge ? … tout cela a unair enfin, moi qui ai l’habitude d’être adorée, jet’adore …

FiorellaC’est vrai ça ?

Le PrinceMais oui c’est vrai … Est-ce que cela ne se voit pasque c’est vrai ? Dis : Est-ce que cela ne se voit pas

FiorellaSi fait …

Le PrinceEh bien alors …

FiorellaEh bien alors … (à part) Mon Dieu ! quel combat …(haut) Eh bien alors … (à part) Ah ! ma foi, il esttrop gentil, je ne veux pas qu’on lui fasse de mal …(haut) Eh bien alors, va-t-en …

Le PrinceJe m’en irai quand ce vénérable vieillard serarevenu … et j’espère qu’il ne reviendra pas vite …avec ses vieilles jambes

FiorellaCe respectable vieillard !

Le PrinceOui

FiorellaNe l’attends pas, car il ne reviendra pas seul

Le PrinceJe sais bien. Il ramènera un guide

Fiorella

Un guide … ah ! ah ! un guide

Le PrinceQue veux-tu dire ?

FiorellaJe veux dire que si tu ne t’en vas pas, et tout de suite,tu es perdu

Le PrinceC’est une farce, pas vraie

FiorellaQui donc crois-tu que je suis ?

Le PrinceAttends un peu que je me rende compte … cechapeau pointu … cette plume rouge tu dois être unebergère …

FiorellaUne bergère, enfant naïf !

Le PrinceCe n’est pas ça

FiorellaNon ! Ca n’est pas ça

Duo

Le PrinceQui donc es-tu, dis-le moi disSi tu n’es pas une bergère ?

FiorellaMon père est un chef de banditsEt je suis fille de mon père

Le PrinceMr votre père est brigand

FiorellaEt je suis fille de mon père

Le PrinceAh ! sapristi ! c’est différentJe vois ce qu’il me reste à faire

FiorellaVa t’en donc }

} bisLe Prince }Je m’en vais

EnsembleFiorella Le PrinceVa t’en donc beau seigneur Je m’en vais moncher cœurSans regarder en arrière Sans regarder enarrière

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Va t’en car j’ai grand peur Je m’en vaismais sans peurVa t-en si tu veux ma plaire Si je pars, c’estpour te plaire

Le PrinceMais par quel chemin, dis-moiDis-moi par où je dois prendre

FiorellaRegarde et depêche-toiDépêche-toi de comprendreEcoute-moiComprends moi

Le PrinceJe t’écoute (bis)

FiorellaDonc voici quelle est ta routeD’abord tu prendras à droitePuis a gauche tu prendrasEt par une route étroiteVivement tu descendras

Le Prince, qui sans écouter la dévore des yeuxC’est bien (bis)C’est très bien

FiorellaLà tu verras la rivièreEt tu la traverserasSur un petit pont en pierresQu’aisément tu trouveras

Le PrinceC’est bien (bis)C’est très bien

(Il l’embrasse)

FiorellaMais non tu n’ecoutes rienEt si tu n’écoutes pasJeune homme, tu te perdras

Le PrinceJe t’écoute (bis)Redis-moi quelle est ma route

FiorellaTu vas d’abord prendre à droite

Le PrincePuis à gauche je prendrai

FiorellaEt par une route étroite

Le PrinceVivement je descendrai

FiorellaC’est bien (bis)C’est très bienLà tu verras la rivière

Le PrinceEt je la traverserai

FiorellaSur un petit pont en pierre

Le PrinceQu’aisément je trouverai

FiorellaC’est bien (bis)C’est très bien

Le PrinceVous le voyez, c’est très bien

(Il l’embrasse encore)

FiorellaEt maintenant, pars, il est tempsCar ils viennent, je les entends …

Le PrinceJe m’en vais et je te quitte

FiorellaVa t’en, va t’en tout de suite

Le PrinceJe te quitte et je m’en vasNe nous reverrons-nous pas ?

FiorellaSi nous nous reverrons, mais … va t’en … tout desuite

Le PrinceJe m’en vas (bis)

Reprise de l’EnsembleFiorella Le PrinceVa t’en donc, beau seigneur Je m’en vas moncher cœurEtc Etc

Le prince se sauve à droite. Du moment ou ildisparait Falsacappa entre à gauche

_____ Scène 8e _____

Fiorella, Falsacappa, puis Pietro

FalsacappaEh bien ! … ce jeune homme …

FiorellaParti …

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Falsacappa, furieuxComment, parti … c’est vrai, ma foi … je le vois là-bas (Il arme un pistolet)

Fiorella, retenant son pèreDoucement, mon père

Falsacappa, repoussant FiorellaLaisse-moi

Fiorella, avec énergie, lui arrachant le pistoletJe vous dis, mon père que je ne veux pas que vousfrappiez ce jeune homme

FalsacappaTu ne veux pas ! …

FiorellaNon, je ne veux pas ! …

FalsacappaOh !

Il lève la main. Pietro qui vient d’entrer en scène, sejette entre eux deux

PietroArrête c’est ta fille ! (Les personnages restentimmobiles) Tableau ! (après ce mot ils changentd’attitude)

FalsacappaJe vois ce que c’est ma fille ! Tu as eu pitié … C’estla suite d’une de ces hésitations, d’un de cesscrupules dont tu me parlais tout à l’heure

FiorellaJustement, mon bon père

FalsacappaVoilà la seconde fois dans la semaine. Ah ! mais,ah ! mais … faut soigner ça c’est très mauvais dansnotre état

FiorellaJe soignerai ça, mon bon père … et je vous prometsde me bien conduire à la première occasion

_____ Scène 9e _____

Les Mêmes, Fragoletto, les Barigands, un Courrier

Chœur de brigandsAh ! ce petit ! ah ! ce petitComme il s’est bravement conduit !Comme il a par un coup hardiConquis son brevet de banditAh ! ah ! ah ! oh ! oh ! ho !Quel homme que Fragoletto

(Pendant ce chœur Fragoletto a paru, tenant etamenant le courrier)

FragolettoFalsacappa voici ma prise :C’est un courrier de cabinetLe galop de sa jument griseRetentissait dans la forêt ;J’étais caché, moi, je l’aviseJe bondis hors de mon bosquetEt profitant de sa surpriseJe lui présente un pistoletIl me répond : pas de bêtiseJe suis courrier de cabinetJe le fais alors par surpriseTomber à bas de son bidetIl veut lutter, je le maîtriseJe l’empoigne par le colletJ’ai pris tout, cheval et la valiseJe te l’apporte au grand completIl me semble quoi qu’on en diseQue ce petit début prometFalsacappa voici ma priseC’est un courrier de cabinet

Reprise du ChœurAh ! ce petit !Etc

FalsacappaIl faut savoir ce qu’il y a dans cette valise (deuxbrigands s’éloignent, gardant le courrier au milieud’eux au fond du théâtre) à nous Domino (Dominofait sauter la serrure) ho ! ho ! nous touchons à lahaute politique (parcourant les dépêches) Il s’agit dece mariage dont je vous parlais, messieurs, de cemariage entre la Princesse de Grenade et notre jeunesouverain, Prince de Mantoue (il lit tout bas) Endéfalqaunt les deux millions que représentent la dotde la Princesse, la somme due par la cour deMantoue à la cour de Grenade se trouve réduite à 3millions Ces 3 millions seront remis à la personnequi accompagnera la Princesse … Trois millions …trois millions … (Il continue a lire) Il est dit dans cesdépêches qu’on envoie au prince de Mantoue leportrait de la princesse de Grenade … Il doit être là,ce portrait ?

PietroLe voici

FalsacappaAh ! mais, elle est fort jolie la Princesse … fortjolie … mais pas plus jolie que ma fille …Il prend dans sa poche le portrait de Fiorella et lecompare

PietroEh bien, chef ?

Falsacappa

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Eh bien … mais je pense qu’il ne faut rien faire quipuisse retarder un si beau mariage … remettons cesdépêches, remettons ce portrait. (Il les remet dans lavalise)

Pietro, basMais prends garde … tu t’es trompé … C’est leportrait de ta fille que tu as mis …

Falsacappa, basOui … c’est le portrait de ma fille mais es-tu biensur que je me sois trompé ?

PietroComment ?

FalsacappaTiens, courrier, reprends ta valise, reprends toncheval … et reprends ta route vers Mantoue

(mouvement des brigands)

DominoQuoi ! chef ! vous permettez ? …

FalsacappaLaissez passer cet homme (Le courrier ) Lajournée a été bonne, mes enfants ; vous m’aviez ditde trouver une idée, l’idée est trouvée, à demainl’exécution ce soir, amusons-nous. J’autorise unepetite débauche pour célébrer l’entrée de Fragolettodans la bande (a Fragoletto) Car tu es des nôtres. Jesuis content de toi, tu seras mon bras droit

PietroEh bien, et moi

FalsacappaJ’en aurai deux !

Finale____

ChœurLe soir la roche étincelleEnfants, allumez les flambeauxVive l’amour, la nuit est belle !Reposons-nous de nos travaux

DominoLes femmes ! … maintenant ! les femmesIl en est temps !

FalsacappaJe vous comprends, coquins, je vous comprendsEt vous permets d’aimer … allez quérir ces dames

Les brigandsAllons chercher les femmes

RepriseLe soir, la roche

Etc

Les 4 femmes, amenées par les banditsAh ! soyez gentils !Messieurs les bandits !Messieurs les brigands !Soyez bons enfants

PietroN’ayez pas peur

FalsacappaRassurez-vous

Les 4 femmesMessieurs les banditsEtc

FalsacappaOn va, selon l’antique usage,Donner à chacune de vous,En légitime mariageUn de ces messieurs pour épouxà FragolettoA toi d’abord … choisis la plus gentille

FragolettoO chef, railleras-tu toujoursJe t’ai dit que j’aimais ta filleEt mon cœur ne saurait contenir deux amours

FalsacappaBien jeune homme !

FiorellaRends-toi célèbre dans notre artTravaille et nous verrons plus tard

FalsacappaHors de concours alors … Pietro dis-nous les nomsDe ceux qui sont encore garçons

PietroEn garçons nous avonsRodolfo, PandolfoPuis encorJacopo, Donato, Castellano~~~Et d’abord regardez çaIl montre 2 petits bâtons

TousRegardez bien ça

PietroLa fillette qu’on choisiraPar dessus cela sauteraEt par ainsi se marieraApprêtonsLes petits bâtons

Tous

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ApprêtonsLes petits bâtons

Barbavano va choisir une des femmes, l’amène surle devant de la scène, se met à genoux et lui faitsigne de sauter par dessus la baguette

Fiorella1Approche ici la filletteEt par dessus la baguetteSaute avec légerté

FalsacappaSaute, saute, la fillette

ChœurSaute, saute la filletteLa femme sauteElle a sauté la filletteLa fillette a bien sauté

Fragoletto, prenant une des femmesViens, et si l’on voit brunetteQue ta jambe est rondeletteLe grand mal en vérité

FalsacappaSaute, saute, la fillette

ChœurSaute, saute la fillette(La femme saute)

Fiorella et FragolettoSaute, sauteEtc

Falsacappa, aux deux dernières femmes3N’ayez pas peur, mes poulettesOn tiendra bas les baguettesPour plus de facilitéSautez, sautez, les fillettes

(Les 4 couples sont réunis)

Domino, Barbavano, CarmagnolaPour célébrer nos fiançaillesDéfonçons les vieilles futaillesGrisons nous tousComme des fousEt chacun ayant sa chacuneAmusons-nous au clair de lune

TousAmusons-nous au clair de lune

Pietro, à FiorellaFille du chef, les soldats de ton pèreEn ton honneur, vident leur verre (bis en chœur)

FalsacappaBuvons !Chantons !

TousBuvons !Chantons !

Falsacappaau milieu des torches qu’on agiteEnrôlez-vous sous la bannièreD’un chef aimable et redouté ;Venez, si vous aimez la guerre,Le plaisir et la liberté

ChœurEnrolez-vous sous la bannièreEtc

Fanfare militaire au dehors

Un brigandAlerte, car j’entends, là bas dans le paysResonner les clairons de nos fiers ennemis

Pietroqui est allé au fondAlerte … car je vois là bas tout près des grottesReluire des casques d’acier

DominoIl a raison …

FalsacappaJ’entends un bruit de bottes …C’est le premier carabinierCe sont les bottes … les bottes … les bottesLes bottes des carabiniers

Touspendant que le bruit approcheJ’entends un bruit de bottesEtc

Fragoletto, avec ardeurS’il faut se battre me voila

FalsacappaHalte là ! petit, halte là !Eteignons tout, faisons silence ;Plus tard nous montrerons du cœurS’il est un temps pour la valeurIl en est un temps pour la prudenceSilence (ter)

Tous, très piano à mesure que s’abaisse la voix desbrigands, le bruit des bottes monte et grossitJ’entends un bruit de bottesEtc

FalsacappaSilence !

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TousSilence !

Obscurité complète. Les brigands se cachent. Lesuns restent en scène étendus par terre. Les autres seretirent derrière les rochers. Paraissent lescarabiniers précédés de leur capitaine. Ils entrent dela gauche, traversent la scène et sortent de la droitesans rien voir et en chantant le chœur suivant :

Chœur des carabiniersNous sommes les carabiniers,La securité des foyers ;Mais par un malheureux hasard …Au secours des particuliersNous arrivons toujours trop tard~~~

Les brigands se relèvent et reparaissent dès que lescarabiniers sont sortis pendant que le bruit des bottesdiminue

DominoLa ronde est-elle terminée,Ou y a-t-il un’second’tournée ?

Pendant que le bruit augmente les carabiniersreviennent

FalsacappaLa ronde n’est pas terminéeVoilà la secone tournéeCachons-nous bien

DominoNe disons rien

Les carabiniers reparaissent à droite. Mêmemouvement que la 1e fois. Ils traversent la scène dedroite à gauche, cette fois sans rien voir et enreprenant le même chœur :

RepriseNous sommes les carabiniersEtc

Falsacappa, pendant que le bruit s’éloigne et se perdN’entendez-vous pasLe bruit de leurs pasChantons bien basBien bas

Le bruit cesse tout à fait. Les brigands reparaissenttous les torche se rallument et éclairent les rochers.Reprise de l’orgie

TousFlamme claireElle eclaireLe repaireDu bandit ;

Et l’orgieEn furieHurle et crieDans la nuit !

Tableau

Acte 2._____

Un site dans la campagne. A gauche, une grandeauberge.

_____ Scène 1ère _____

Pipo, Pipa, Pipetta, 8 Marmitons (4 hommes et 4femmes)

Au lever du rideau, tous vont et viennent, ayant dansles mains, l’un des bouteilles, l’autre des volailles,l’autre un bouquet, etc

ChœurLes fourneaux sont allumésEt les canards sont plumésLes consommateurs viendrontMaintenant quand ils voudrontLes fourneaux sont allumésEt les canards sont plumés.

PipoRotisseurs petits et grands,Mes amis et mes enfants.Aujourd’hui, j’en ai l’espoir,Vous ferez votre devoir,Oui, vous ferez votre devoir.

ChœurOui, chacun fera son devoir.~~~Allez, mes amis, faites ce que vous avez à faire. Neperdez pas de temps.

Reprise.Les fourneaux sont allumésEtc.

Les 8 marmitons sortent. Restent en scènel’aubergiste, sa femme et sa fille. La femme del’aubergiste a dans les mains un bouquet et la filleune bouteille couverte de toiles d’araignée.

_____ Scène 2e _____

Pipo, Pipa, Pipetta

Pipo.Ma femme et ma fille, entourez-moi. Quelle journée,mon Dieu, quelle journée !

Pipa.

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Quel coup de feu !

Pipo.Et quelle excellente idée j’ai eue de m’établir sur lafrontière même, au beau milieu de la route quiconduit de Grenade à Mantoue. Jamais, sans cela,nous n’aurions eu la bonne aubaine qui nous arriveaujourd’hui.

Pipetta.Ça, c’est vrai, mon père.

Pipo.Et maintenant, à l’ouvrage ! Je vais, moi, soigner lesfourneaux. Vous, ma femme, ayez soin de mettre desfleurs partout … Quant à toi, ma fille …

Pipetta.J’ai fait ce que vous m’avez dit mon père, et mis destoiles d’araignée à un tas de bouteilles de vinextraordinaire.

Pipo.Bien, ma fille, bien, allez toutes les deux.

Pipa et Pipetta rentrent dans l’auberge.

_____ Scène 3e _____

Les Mêmes, Les Brigands.

Au moment ou Pipo se retourne pour aller à sesaffaires, il se trouve nez à nez avec Pietro etFragoletto

Les brigands.

Pietro et Fragoletto.Soyez pitoyablesEt donnez du painA de pauvres diablesQui meurent de faimFacitoté caritatem,Date panem, daté panem.~~~Pipo.Allez au diable, je n’ai pas de monnaie

Falsacappa et Fiorella(entrant)Soyez pitoyables, etc.

Barbavano et Carmagnola, et d’autres brigandsentrent et chantent aussi, soyez pitoyables etc. Achaque entrée nouvelle le ton s’élève ; tous barrentle passage à l’aubergiste.

Pipo.La peste soit des gens !

TousSoyez pitoyables

Etc.~~~Pipo.Ah ! ça, mais, qu’est-ce que c’est que ces gens-là ?

Tousd’une voix formidableSoyez pitoyablesEtc.~~~A la fin du chœur, Pipo est entouré de toutes partspar les brigands.

FalsacappaEmparez-vous de cet homme-là.

CarmagnolaOui, Falsacappa, nous le tenons.

Pipo, épouvantéFalsacappa !

FalsacappaRépondez, bonhomme … C’est bien à votrehôtellerie, n’est-ce pas, que doivent venir les gensenvoyés par notre auguste maître, le Duc deMantoue, au-devant de sa jeune fiancée, la Princessede Grenade ?

Pipo.Oui, Mr le voleur.

FalsacappaC’est également ici que doit venir la jeune Pincesseavec sa suite ? C’est ici qu’elle doit passer la nuit ?

Pipo.Oui, Mr le brigand !

Falsacappa.C’est bon. (aux brigands) Vous avez entendu,Messieurs, et je peux vous dire tout de suite ce quenous aurons à faire dans la journée : 1°, (désignantPipo) Nous allons fourrer Monsieur dans sa caveavec toute sa famille et ses marmitons, nousprendrons leurs habits et c’est nous qui recevrons lesgens qui viennent au-devant de la Princesse.

Les Brigands.Bon !

Falsacappa.2°. Quand les gens qui doivent venir de Mantoue au-devant de la Princesse seront arrivés, nous lesfourrerons, eux aussi, dans la cave de Monsieur,nous prendrons leurs habits et c’est nous quirecevrons la Princesse et sa suite.

Les brigands.Bien !

Falsacappa

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Une fois la Princesse et sa suite installées dans lamaison, je vous dirai ce que nous avons à faire. PetitFragoletto, emmène-moi ce gaillard-là.

FragolettoOui, chef.

Pipo.Une objection, capitaine.

FalsacappaFaites-la voir.

Pipo.Je crains que ma cave ne soit un peu étroite pour tantde monde.

FalsacappaVous vous serrerez … et si vous ne vous serrez pas,on vous serrera … Emmène-les, Fragoletto,Carmagnola et Barbavano, restez.

Reprise.Soyez pitoyablesEtc.

Les brigands, sur la reprise du cœur, sortent enemmenant l’aubergiste. Restent seulement en scène :Falsacappa, Pietro, Fiorella, Carmagnola etBarbavano.

_____ Scène 4e _____

Falsacappa, Pietro, Fiorella, Carmagnola,Barbavano.

FalsacappaLe jeune Carmagnola ira s’embusquer sur la route deMantoue et viendra nous avertir dès qu’il apercevrales gens qui viennent au-devant de la Princesse …Toi, Barbavano, sur la route de Grenade, et dès queparaîtront la princesse et son cortège tu tedépêcheras de venir nous l’annoncer.

Tous les deux.Oui, chef. (Ils sortent)

_____ Scène 5e _____

Falsacappa, Pietro, Fiorella.

Falsacappa.Quant à toi, ma fille, tu connais mes vastes desseins,je te les ai expliqués, ainsi qu’à ce digne vieillard.

Pietro.Très canailles, tes vastes desseins, mais trèsingénieux.

Falsacappa.Hier, après avoir protégé la fuite de ce jeune hommequi avait un collier d’or, tu m’as promis de reparer

un instant d’oubli. Tu m’as promis de me prouverton zèle à la 1ère occasion … cette occasion estvenue … c’est sur toi que repose toute macombinaison.

Fiorella.Et si je consens à seconder vos vastes desseins sigrâce à moi vous ampochez les 3 millions, quellesera ma recompense ?

Falsacappa.Veux-tu 5% ?

Fiorella.Oh ! mon père !

Falsacappa.10 ou 15% ?

Fiorella.Vous ne me comprenez pas, mon père … c’est bienpeu de chose, allez, l’argent quand on est pincéecomme je le suis.

Falsacappa.Que veux-tu alors ?

Fiorella.Lui !

Falsacappa.Le petit Fragoletto.

Fiorella.Vous lui donnerez, à lui, les 15%, et lui, vous me ledonnerez … Eh bien ! papa, est-ce entendu ?

Falsacappa.Allons … c’est entendu.

Fiorella.Oh ! alors.

Couplets.IAprès une telle promesseTu peux compter sur ton enfant.Elle trouvera, ta princesse,A qui parler en arrivant.On sera femme, on sera fine,On sera courageuse aussi ;Mon esprit et ma carabineSont à toi puisque c’est pour lui.Oh ! p’tit papa.Puisqu’il s’agit de mon bonheurJe n’te dis qu’çaAs pas peur, papa, as pas peur.

IITon affaire devenait mienneJe vais m’y mettre. Rien n’est telPour faire prendre de la peine

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Qu’un peu d’intérêt personnel.Si pour avoir de bons servicesLes patrons donnaient aux commisUne part dans les bénéficesLes patrons seraient bien servis.

Falsacappa.Ne dis pas des choses comme ça, mes hommes vontse mettre en grève.

Fiorella.Oh ! p’tit papa,Etc.~~~

Falsacappa.Embrasse-le, ton bon père. (Fiorella l’embrasse)Entre Fragoletto apportant 3 costumes de marmitons.Eh bien ! petit Fragoletto ?

_____ Scène 6e _____

Les Mêmes, Fragoletto.

Fragoletto.L’aubergiste, sa femme et ses garçons sont dans lacave. Nous les avons déshabillés pris leurs habits.

Fiorella.Oh !

Fragoletto.Mes camarades sont en train de se déguiser enmarmittons. J’ai mis à part le costume de la jeunefille.

Falsacappa.Va-t-en le revêtir, ô ma Fiorella. Tu seras aubergisteavant d’être …

Fiorella.Chut ! (Fragoletto l’embrasse)

Falsacappa, les voyant.Eh ! là-bas ! Eh !là-bas !

Fiorella se sauve.

_____ Scène 7e _____

Falsacappa, Pietro, Fragoletto.

Falsacappa.Tu as apporté les costumes ?

Fragoletto.Oui, maitre, j’en ai apporte trois.

Falsacappa.Un pour toi, mon fidèle Pietro, un pour moi …

Fragoletto.

Et le troisième ?

Falsacappa.Pour toi, petit Fragoletto, pour toi …

Fragoletto.Merci.

Falsacappa.Et maintenant, de l’ensemble, n’est-ce pas ? (Ilsôtent leurs vestes et leurs chapeaux) La vesteblanche, d’abord … y sommes-nous ?

Pietro.Nous y sommes !

Falsacappa.Une, 2,3. Ça y est. Maintenant, le tablier.

Fragoletto.Le tablier, c’est fait.

Pietro.Moi, je n’y suis pas encore … Mes vieilles mains …

Fragoletto.On va vous aider, bon Pietro.

Falsacappa.Le bonnet de coton, maintenant. Tâchons d’allerbien ensemble pour le bonnet de coton … une, 2,trois …

Fragoletto et Pietro.Ça y est. (Ils mettent leurs bonnets en même temps)

Falsacappa.Eh bien ! mais cela ne nous va pas trop mal, il mesemble

Pietro.Toi, ça ne te change pas.

Falsacappa.Comment ça ne me …

Pietro.Mais non. Tu as toujours l’air d’un chef.

Falsacappa.D’un chef ? … ah ! chef ! … très bien ! … tu jouessur le double sens du mot.

Pietro.Justement, chef de voleurs.

Falsacappa.Et chef de cuisine.

Fragoletto.Nous avons encore chef … d’une nombreusefamille.

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Falsacappa.Et chef-lieu d’arrondissement. Mais laissons cela.Savez-vous que nous avons tout à-fait bon air sousce costume, et qu’il est fâcheux que quelquevoyageur ne profite pas du moment pour venir nousdemander à déjeûner.

Fragoletto.Ce serait amusant.

Pietro.En voilà un qui pourrait se vanter d’être bien reçu.

Falsacappa.Si bien reçu qu’après être venu ici, il lui serait tout-à-fait impossible d’aller autre part.

Pendant les 3 dernières répliques, ils ont caressé lacrosse des pistolets et les poignards qu’ils ont gardésà leurs ceintures avec leur costume de marmiton. Ilsse sont en même temps placés pour chanter.

Trio.

Falsacappa.Voyez là-bas ce pauvre voyageurDans son manteau qui s’en va sur la route,Il voit la nuit venir avec terreur …Ce qu’il voudrait c’est casser une croûte.

Fragoletto.Petit, petit …

Falsacappa et Pietro.Petit, petit …

Falsacappa.Si tu te sens en appétit.

Tous les trois.Petit, petit …

Falsacappa.Arrête-toi, viens, je t’en prie,Arrête toi, nous t’invitonsA visiter l’hôtellerieDes trois jolis marmitons.Arrête toi dans l’hôtellerieDes trois jolis marmitons.

Ensemble.Arrête-toi, je t’en prieEtc.

Fragoletto.Vous y serez bien logés.

Pietro.Bien choyés.

Falsacappa.

Bien hébérgés.

Fragoletto.Et pour cela vous donnerez,Bons voyageurs, tout ce que vous aurez. (ter)

Ensemble.Arrête-toi, etc.

Falsacappa.Si l’on vient à la cuisine

Fragoletto.La cuisine

Falsacappa.Je pense que l’on devineL’on devine (bis)Rien qu’à nous voir tous les trois,Tous les trois (bis)Que nous faisons la cuisine

Tous les troisNous la faisons qu’on s’en lèche les doigts !

Pietro, tirant un grand poignard.C’est moi que je larde …

Fragoletto, même jeu.Et moi qui découpe …

Falsacappa, même jeu.Et c’est moi qui trempe la soupe.Oui, c’est moi qui trempe la soupe.Si l’on vient à la cuisineEtc.

Fragoletto.Venez donc, mes chers enfants,Pour vous le couvert est mis,Et si vous êtes contentsEnvoyez-nous vos amis. (bis en chœur)

Pietro.C’est moi que je lardeEtc.Si l’on vient à la cuisineEtc.

Ensemble.Venez donc manger les bons mirotonsQue nous fricottonsJolis marmitons

Falsacappa.Et si le voyageurEst une voyageuse …

Pietro et Fragoletto.Et si le voyageurEst une voyageuse …

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Falsacappa.Prenant la bouche en cœurEt la voix doucereuse,Nous dirons tous les trois :Voyageuse au gentil minois,Voyageuse au regard si douxArrêtez-vous.

Pietro.Où courez-vous ?

Tous.Où courez-vous ?

Falsacappa.Je cherche une hotellerie,Mes bons messieurs,Le repas me rendrait la vieUne heure ou deux (ter)

Fragoletto.Entrez ici,Car mon hôtel n’est plus joli

Tous.Entrez ici.

2.Falsacappa.Je suis femme et très timide,Sachez-le bien,Un hôtel à l’aspect candideMe plairait bien

Fragoletto.Entrez iciEtc.

Pietro.Bon voyageur, arrêtez-vousEntrez chez nous (bis)

Fragoletto.Nos lits de plumes sont douxVous y serez très bienEt si l’on vous dit qu’chez nousY a des bêt’s n’en croyez rien.

Tous.N’en croyez rien.

_____ Scène 8e _____

Les Mêmes, Carmagnola.

Carmagnola.Chef ! chef !

Falsacappa.Qu’est-ce qu’il y a ?

Carmagnola.

Pardon, je ne vous remettais pas. Les gens quiviennent au-devant de la Princesse … ils arrivent …les voici …

Falsacappa.Combien sont-ils ?

Carmagnola.Il y a d’abord un petit gros, un seigneur.

Falsacappa.Oui, je sais … le chef de l’ambassade … (à Pietro)Ça t’amuserait-il d’être le chef de l’Ambassade ?

Pietro.Ça ne me déplairait pas.

Falsacappa.Pas un mot de plus. Tu l’es, ou du moins tu le serastout-à-l’heure. Et avec le petit gros ?

Carmagnola.Il y a le capitaine des carabiniers.

Falsacappa.Une vieille connaissance !

Carmagnola.Et 6 de ses hommes.

Falsacappa.Six carabiniers … Nous allons les fourrer dans lacave au vin … comme ça ils nous laisseronttranquilles. Vous entendez, dans la cave au vin.

Carmagnola.Les voilà ! … Les voilà ! …

Falsacappa.Vite, vite, Fragoletto … vois si nos hommes sontprêts … qu’ils viennent.

_____ Scène 9e _____

Ritournelle. Entrent les marmitons armés jusqu’auxdents.

Les Mêmes, Les Brigands.

Il faut que tous ces marmitons, avec leurs vestesblanches, leurs bonnets de coton, leurs longuesmoustaches et leurs pistolets à la ceinture aient unair tout-à-fait extraordinaire.

Falsacappa.Messieurs, vous êtes bien, très bien. Seulement, jevous en prie, dissimulez. Ayez l’air de vraismarmitons. Dissimulez, dissimulez.

Fiamella.Nous faisons ce que nous pouvons, chef, mais nousne pouvons dissimuler davantage.

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Falsacappa.Eh ! eh ! Mesdemoiselles, vous n’êtes donc pasretournées dans vos familles ?

Zerlina.Non, chef.

Falsacappa.Et pourquoi ça ?

Zerlina.Nous avons eu peur d’être grondées.

Falsacappa.Pour être rentrées beaucoup trop tard ?

Cicinna, Bianca.Justement, chef.

Falsacappa.Et vous avez trouvé plus simple …

Bianca.De ne pas rentrer du tout.

Falsacappa.C’est fort bien.

Domino, entrant.Chef, voilà le cortège.

Falsacappa.Mes enfants, je vous le répète, dissimulez.

_____ Scène 10e _____

Les Mêmes, Les 3 aides-de camp, 2 pages, LeCapitaine des carabiniers, Carabiniers.

Les Brigands.Dissimulons, dissimulons }Ayons l’air de vrais marmitons. } bis

Entrée du cortège de l’Ambassade venant deMantoue, le baron de Campotasso, le capitaine, 6carabiniers, deux pages.

Chœur.Voilà d’étranges figures,De singulières tournures !Ces marmitons, sauf respect,Ont un singulier aspect !

Les Brigands.Dissimulons, dissimulons, }Ayons l’air de vrais marmitons. } bisDissimulons (bis)~~~

Campotasso et le capitaine des carabiniers viennentsur le devant de la scène.

Couplets._______

1.Campotasso.Nous avons ce matin tous deuxEté mandés par Son Altesse,Laquelle nous a dit : Messieurs,Allez recevoir la Princesse.

Le Capitaine.Recevoir la Princesse.

Campotasso.Pour la recevoir que faut-il ?Que faut-il pour la satisfaire ?Combiner l’élément civilAvec l’élément militaire.

Le Capitaine.Je suis le militaire.

Campotasso.Il est le militaire.

Tous deux.Le Militaire.Et voilà comme en un instant }On a composé l’Ambassade }Qui devait aller au-devant } bis en chœurDe la princesse de Grenade. }

2.CampotassoEn nous envoyant tous les deux,Notre maître eut raison, je pense ;(s’inclinant devant le capitaine)Il a voulu flatter les yeuxTout autant que l’intelligence

Le Capitaine (même jeu)C’est beau, l’intelligence !

CampotassoA ma future, a-t-il dit,Il suffit d’envoyer, en somme,D’envoyer un homme des prixEn le soutenant d’un bel homme.

Le Capitaine.Je suis, moi, le bel homme !

Campotasso.Il est, lui, le bel homme !

Tous deux.Ah ! le bel homme.

Reprise.Et voilà commentEtc.

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~~~

Falsacappa.Et alors, nous avons l’honneur de parler à … ?

Campotasso.Vous avez l’honneur de parler à S. Exc. le baron deCampotasso.

Falsacapa, à Pietro.Campotasso … Vous l’entendez, bon vieillard ?

Pietro.Oui … J’entends ! …. et je comprends ! …

Campotasso.Nous sommes bien ici sur la limite des 2 pays, n’est-ce pas ?

Pietro.Voyez l’enseigne.

Campotasso, lisant.« Aux frontières naturelles. - Pipo, aubergiste … »C’est bien cela. Vous êtes Pipo ? …

Pietro.Je suis Pipo !

Tous les brigands.Ils est Pipo. C’est Pipo.

Le Capitaine.Qu’est-ce que ce me fait que ce soit Pipo ?

Campotasso.Ces marmitons sont plus gais que leur figure ne leferait supposer. (montrant les poignards) Qu’est-ceque c’est que ça ? Est-ce que ça vous sert pour fairela cuisine ?

Falsacappa.Non. Mais comme l’on prétend que Falsacappa estdans les environs …

Le Capitaine, avec dédain.Oh ! Falsacappa !

Falsacappa.Oui, Falsacappa !

Le Capitaine.Je l’ai taille en pièces hier soir.

Falsacappa.Etes-vous sûr ?

Le Capitaine.Tout-à-fait sûr. Et la 1ère fois que je le rencontrerai,je le retaillerai.

Falsacappa.

Mais si vous l’avez taillé, comment pourrez-vous leretailler ?

Le Capitaine.Je pourrais vous répondre qu’après l’avoir taillé dansun sens je pourrais le retailler dans l’autre. Maisj’aime mieux vous dire que j’ai eu tort de vous devous dire que je l’avais taillé parceque la vérité estque je ne l’ai pas taillé. Mais je le taillerai.

Falsacappa.Et pourquoi ne l’avez-vous pas …

Le Chef.Parceque je n’ai jamais pu le rencontrer.

Falsacappa.C’est une raison.

Le Capitaine.Mais je le rencontrerai.

Falsacappa.Vous croyez ?

Le Capitaine.J’en suis sûr car je sais pourquoi je n’ai jamais pu lerencontrer.

Tous.Pourquoi ça ?

Le Capitaine.C’est à cause de mes trompettes qui faisaient dubruit en l’avertissant … Alors vous comprenez … jesupprime les trompettes.

Falsacappa.Ah ! Diable !

Le Capitaine.Et je les remplace par des tambours, comme dansl’infanterie.

Falsacappa, soulagé.Ah !

Entre précipitamment Barbavano.

_____ Scène 11e _____

Les Mêmes, Barbavano.

Barbavano, accourant.Chef ! chef !

Falsacappa.Qu’est-ce qu’il y a ?

Barbavano, bas.L’Ambassade Espagnole de Grenade.

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Falsacappa, bas.Où est-elle ?

Barbavano, bas.Sur les talons.

Falsacappa, bas.Et les autres qui sont encore là … Nous ne seronsjamais prêts … (haut) Allons, vous autres,dépêchons-nous, entrez là-dedans.

Campotasso, choqué.Qu’est-ce que vous dites ?

Fragoletto.On vous a préparé une collation.

Campotasso.Ah ! c’est juste … Venez-vous, capitaine ?

Falsacappa.On a spécialement préparé un petit lunch pourMessieurs les carabiniers.

Le Capitaine.Y a-t-il à boire ?

Falsacappa.Il y a à boire. Vous verrez ça.

Le Capitaine.Allons alors.

Pietro, le bousculant.Et plus vite que ça … Allons … allons ! …

Le Capitaine.Ah ! ça mais …

Fragoletto, les poussant dehors.Dépêchez-vous, on vous dit …

Falsacappa.Et ne faites pas les malins …

Bousculade pour décider Campotasso et sa suite àentrer dans l’hotellerie. Cette bousculade se fait surle morceau qui suit et qui s’enchaîne avec laritournelle de l’air qui annonce l’arrivée del’ambassade Espagnole.

Chœur.Les Brigands.Entrez là (bis)Plus vite que ça.~~~

Falsacappa.Ce sont eux … Ah ! qu’ils ont bien l’air Espagnol !Il était temps … voici les Espagnols.

Il sort avant l’entrée des Espagnols.

_____ Scène 12e _____

Gloria-Cassis, Le Précepteur, 4 ou 5 SeigneursEspagnols, Pages, La Princesse et son 1er page,Adolphe de Valladolid, 4 dames d’honneur.

Chœur.Madrid, princesse des Espagnes,Ville favorable aux amoursNous avons quitté tes campagnesDepuis déjà quinze grands jours.(sur un air de fandango)Y a des gens qui s’disent EspagnolsEt qui n’le sont pas, Espagnols ;Pour nous, nous sommes de vrais Espagnols,Et ça nous distingu’des faux Espagnols.

Adolphe, bas.Il va donc, ma charmante Princesse,Il va donc falloir nous quitter.

La Princesse.Pour m’en aller épouser une altesseQue je ne pourrai supporter.

Chœur.Madrid etc.

Gloria-Cassis.Jadis vous n’aviez qu’un’patrie,Maintenant vous en avez deux ;La nouvelle c’est l’Italie ;L’Espagne Grenade c’est cell’de vos aieux ;Vous devez aimer la seconde,On vous le dira, je vous dis,Mais n’oubliez, pour rien au monde,Que l’Espagne Grenade est votre vrai pays.

II.Et quand vous aurez la puissance, Usez-en, c’est moi qui vous l’dis,Pour faire avoir de l’influenceAux gens de votre ancien pays.Donnez-leur tout l’argent d’MantoueEt tous les emplois importants.Si les Italiens les gens d’ici font la moueLes Espagnols gens d’là-bas seront contents.~~~

La Princesse.N’est-ce pas ici que l’on devait nous attendre ?

Gloria-Cassis.Si fait, Princesse.

La Princesse.Eh bien, mais, je ne vois personne.

Le Précepteur.Ni moi non plus, je ne vois personne et je la trouveraide.

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Adolphe.Le fait est que c’est indécent.

Gloria-Cassis.Jamais on ne s’est moqué à ce point-là de la morgueEspagnole.

Le précepteur.Il faut voir cela, il faut voir. (Il frappe à la porte del’auberge) holà ! holà ! Est-ce qu’il n’y a personne ?

Falsacappa, dans l’auberge.On y va, on y va.

Une de fenêtres de l’auberge s’ouvre et l’on voitFalsacappa en train de s’habiller.

Falsacappa.Mesdames, Messieurs, j’ai bien l’honneur … mais,Dieu me pardonne, est-ce que vous n’êtes pas lespersonnes qui viennent de la cour de Grenade ? …

La Princesse.Mais si … nous sommes ces personnes …

Falsacappa.Ah ! c’est très bien ! … c’est très bien !

Gloria-Cassis.Et vous, est-ce que vous êtes, vous, au nombre despersonnes que l’on envoie au-devant de nous ?

Falsacappa.Mais oui. Je suis, moi, le Capitaine des carabiniers,mais il n’y a pas que moi, il y a mes hommes … Etpuis le baron de … le baron de … (Il cherche le nomqu’il ne sait pas)

Gloria-Cassis.Le Baron de Campotasso ?

Falsacappa.Oui, et puis des petits pages … Vous verrez tout ça,tout-à-l’heure, vous verrez, c’est très convenable …Eh ! baron de … comment avez-vous dit ?

Gloria-Cassis.Campo-Tasso !

Falsacappa, appelant.Eh ! Campo-Tasso. Eh ! Campo-Tasso !

L’autre fenêtre s’ouvre. Paraît Pietro également entrain de s’habiller. Il met le costume de Campotasso.

Pietro.Campotasso, c’est moi ! Qu’est-ce qu’il y a ?

Falsacappa.Voilà les personnes de Grenade.

Pietro.Allons donc !

Falsacappa.Parole d’honneur, avec la princesse.

Pietro.Est-il possible ? … C’est vous, princesse ? … Jevous demande pardon, je finis de m’habiller et jedescends.

Gloria-Cassis.Oui, descendez et dépêchez-vous, car en vérité, vousme permettez de vous dire que vous vous moquez unpeu de la morgue Espagnole.

Falsacappa.Nous descendons.

Les 2 fenêtres se referment. Stupeur et indignationde l’Ambassade Espagnole.

La Princesse.Eh bien ! qu’est-ce que vous en dites ?

Gloria-Cassis.Je dis que c’est là une conduite révoltante … surtoutde la part des gens qui nous doivent de l’argent.

La Princesse.Comment ?

Gloria-Cassis.Je ne voulais rien dire … mais en vérité … devant depareils procédés … Savez-vous pourquoi vousépousez le prince de Mantoue, Princesse ? … c’estparceque la cour de Mantoue nous devait cinqmillions, et que nous ne pouvions pas arriver à nousfaire payer … Alors nous leur avons proposé unetransaction. Nous leur avons dit : Voulez-vousepouser notre Princesse ? Nous vous ferons grâce de2 millions et ce sera la dot … Restent 3 millions …Pouvez vous nous payer 3 millions ? … Ils ontrépondu : Pour trois millions, nous pouvons lespayer … Amenez la Princesse … nous remettrons 3millions à la personne qui l’accompagnera … Voilàcomment vous épousez le prince de Mantoue.

La Princesse.Oh !

Gloria-Cassis.Et c’est à moi, comte de Gloria-Cassis, qu’ilsdoivent remettre les trois millions et il faudra qu’ilsles donnent … il faudra qu’ils les donnent ! …

La Princesse.Vous avez entendu, Adolphe ?

Adolphe.J’ai entendu !

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La Princesse.Et moi qui me contenais … moi qui me disais : ilfaudra au moins garder quelques bienséances …Ah ! bien ! … Je ne garderai que vous, mon beaupage ! …

Entre Falsacappa avec le costume du chef descarabiners sur le dos, mais très incomplet lecostume, si bien qu’il a l’air moitié brigand, moitiécarabinier, un vrai saltimbanque ; du reste, à partirde ce moment, les costumes doivent être un mélangeabsurde de marmitons, de carabiniers, de seigneursItaliens et Espagnols.

_____ Scène 13e _____

Les Mêmes, Falsacappa, puis Carmagnola, -Domino, en carabinier, puis Pietro en Campotasso.

Falsacappa.Me voilà, Princesse, ma voilà ! (Il salue en ôtant soncasque. Le bonnet de coton est resté dessous. Il lefait disparaître.

Gloria-Cassis.Qu’est-ce que c’est que ça ?

Falsacappa.Le Chef des carabiniers du Prince de Mantoue …avec mes hommes … Je vais les chercher. (Il faitsigne) Messieurs, venez, mes hommes, venez.(Entrent Carmagnola et Barbavano) Belle tenue,n’est-ce pas ?

Gloria-Cassis.Mais non !

Falsacappa.Tenue de campagne … princesse, tenue decampagne … le désordre … la lutte …l’animation … Ils sont superbes !

Les Carabiniers se mettent en ligne.

Les Espagnols.heu ! heu !

Falsacappa.Voulez-vous les voir manœuvrer ? Non, vous savez,si vous voulez …

La Princesse.Nous n’osions pas vous le demander.

Falsacappa.Oh ! ne vous gênez pas … Vous allez voir.Attention, vous autres. (Il tire son sabre) Sabre !sabre ! (Carmagnola et Barbavano tirent leurssabres. Domino ne peut arriver à atteindre le sien)

Gloria-Cassis.Le petit ne pousse peut pas.

Falsacappa.Il est intimidé … et puis d’ailleurs il ne peutjamais … Ma une petite manœuvre, maintenant. Enavant, vous autres, en avant.

(Manœuvre pendant laquelle parait Pietro enCampotasso)

Falsacappa.Arrivez donc, Baron, l’on n’attend plus que vous.

Pietro.Me voilà, me voilà … Qu’est-ce que je vais vousservir ? beefteack aux pommes, pieds de moutonpoulette ?

La Princesse.Qu’est-ce qu’il dit ?

Falsacappa, bas à Pietro.Qu’est-ce que tu dis, animal ?

Pietro, bas à Falsacappa.Eh bien ! puisque je suis marmiton … il est toutnaturel que je …

Falsacappa, bas.Mais tu ne l’es plus, marmiton, c’est fini.

Pietro, bas.Qu’est-ce que je suis alors ?

Falsacappa, bas.Tu es le baron de Campotasso … tu viens au-devantde la Princesse …

Pietro.Ah ! c’est juste ! pardonnez-moi, Princesse … il y asi peu de temps que j’ai quitté la cuisine …

Il passe avec dignité et va serrer la main duprécepteur qui a le costume de Basile.

Gloria-Cassis.Mais, qu’est-ce qu’il dit ? qu’est-ce qu’il dit ?

La Princesse.La cuisine …

Falsacappa.La cuisine politique, Princesse … la cuisinepolitique … Ne faites pas attention …

La Princesse.Ah ! très bien …

Gloria-Cassis.C’est à moi de vous présenter les personnes quiaccompagnent la Princesse. Moi d’abord, le Comtede Gloria-Cassis, grand d’Espagne de 11e classe …chef réel de l’ambassade … Pablo précepteur …

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quelques seigneurs sans importance … Adolphe deValladolid …

La Princesse.Mon page favori.

Adolphe et Princesse.Couplets.

La Princesse.Il ne me quittera jamais.

Adolphe.Jamais !

Pietro.Jamais ?

La Princesse.Jamais ! … Est-ce que vous comptez vous opposer ?

Pietro.Moi ? … Eh bien, par exemple, voilà quelque chosequi m’est égal …

Gloria-Cassis.A moi, Baron, deux mots …

Pietro.Baron … Attendez d’abord que je me rapelle : (àFalsacappa) Je suis toujours le baron de Grand potcasso.

Fasacappa, bas.Il n’y a pas de pot casso là-dedans … J’ai ditCampo-Tasso.

Pietro, bas.C’est bon ! (à Gloria-Cassis) Je vous écoute !

Gloria-Cassis.Vous êtes en mesure, je suppose ?

Pietro.En mesure … pourquoi faire ? …

Gloria-Cassis.Pour nous payer les trois millions … Vous faitessemblant de ne pas me comprendre.

Pietro.Les trois millions, oui … Je sais … Je sais …

Gloria-Cassis.Vous les donnerez, par e Votre Dame deCampostelle. Vous les donnerez. J’ai apporté un sacpour le emporter.

Falsacappa.Un sac ?

Gloria-Cassis.

Oui, un sac aux armes de Grenade … Montrez lesac.

Un des Seigneurs sans importance fait voir le sac.

Falsacappa, semparant du sac.Vous entendez, Messieurs, j’appelle votre attentionsur cela parceque cela est important … VoiciMonsieur qui est venu d’Espagne avec un sac, çapeut paraître invraisemblable de venir d’Espagneavec un sac … mais c’est comme ça … Monsieur estvenu avec un sac, et dans ce sac on doit mettre 3millions qui doivent être payés par la cour deMantoue … Venez voir le sac, Messieurs, venez voirle sac !

Tous, avec joie.Le sac ! … Le sac ! … (Pietro se jette la tête la 1èredans le sac. On a toutes les peines du monde à l’enretirer.)

Falsacappa, à Pietro.Il n’y a encore rien dedans.

Gloria-Cassis.Mais qu’est-ce qu’ils ont … mon dieu … qu’est-cequ’ils ont ?

Les brigands déguisés se précipitent à l’envie etcontemplent le sac avec enthousiasme.Musique douce.

_____ Scène 14e _____

Les Mêmes, Fiorella, Fragoletto.

La Princesse.Qu’est-ce que c’est que ça ?

Falsacappa.C’est votre collation, princesse, votre collation quel’on vous apporte …

Entrée des 4 petits pages apportant la table, puisFragoletto et Fiorella apportant des fruits, etc.

Adolphe.A la bonne heure … en voilà qui ont figure humaine.Ils sont gentils, très gentils.

La Princesse.Qu’est-ce que vous m’apportez-là ?

Fragoletto.Du lait de nos étables, princesse, et des fruits de nosjardins.

La Princesse.C’est donc vous, mon petit homme, qui êtes lemaître de cette hotellerie ?

Fragoletto.

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Oui, princesse.

La Princesse.Et elle … c’est ?

Fragoletto.C’est mon amoureuse.

La Princesse.Ah ! vous êtes ? …

Fiorella.Oui, princesse … Je suis son amoureuse … et lui,c’est mon amoureux.

La Princesse.Vous entendez, Adolphe, des amoureux.

Adolphe.Oui, princesse, des amoureux.

La Princesse.Adolphe ! … Donnez un petit tabouret pourAdolphe … il collationnera avec moi … Venez,Adolphe, venez près de moi … là … là … (Tousdeux s’asseoient) Et qu’est-ce que vous allez fairepour m’amuser, pendant que je boirai le lait de vosétables et que je mangerai les fruits de vos jardins ?

Fiorella.Si vous voulez la canzonetta ?

Fragoletto.Canzonetta di amare.

La Princesse.D’amour ?

Tous les deux.Oui, Princesse.

La Princesse.Je crois bien que je la veux !

Pietro.Prétentieux, mais charmant !

Il faut là un tableau très joli. La Princesse etAdolphe assis à la petite table au milieu de la scène.Les 4 petits pages servent la princesse et Adolphe,Fiorella et Fragoletto chantent. Les Espagnols d’uncôté, les brigands de l’autre. Tous s’examinent ets’observent. Tout le monde du reste chantera lerefrain des couplets.

Couplets.

Fiorella et Fragoletto.Hélas ! he ! la ! chère petiteArrêtez-vous, ne fut-ce qu’un instant ?Où courez vous si vite ?Est-ce l’amour qui là-bas vous attend ?

Tournez un peu la tête, arrêtez-vous, petitePetite, arrêtez vous, ne fut-ce qu’un instant !Psitt ! (quater)Pourquoi donc m’arrêter ?Qu’avez-vous à me dire ?Ce qu’on va vous conterNe peut vous mécontenterPsitt (4 fois)

Chœur.Fillette garde à vous !Rien n’est dangereux commeD’écouter un jeune hommeQui parle d’un ton si doux.

Fiorella et Fragoletto.2.Ce qu’il tenait tant à lui dire,Il le lui dit tout bas et de très près ;La belle écoute, elle soupire,Un peu confuse et lui répond : jamais !Jamais ! voilà le mot qu’il ne faut jamais direCes beaux discours etaient interrompus par des(imitant le bruit des baisers)Pourquoi donc m’arrêter, qu’avez-vous à me dire ?(bruit de baisers)Ce qu’on va vous conterNe peut vous mécontenter !(bruit des baisers)

Chœur.Fillette garde à vousEtc.~~~

Fiorella et Fragoletto.3.Et maintenant, à la mairieQuand irons-nous ? Dit elle, à demi-voix ? …Lui de répondre : ô mon amieN’y comptez pas encor pour cette fois !Lorsque l’on veut, la belle, aller à la mairie,Le bon chemin n’est pas de passer par le bois !(riant)Ah ! (4 fois)Pourquoi donc m’arrêter ?Qu’avez-vous à me dire ?(riant)Ah ! (4 fois)Ce qu’on va vous conterNe peut vous mécontenter(riant)Ah ! (4 fois)

Chœur.Fillette, garde à vousEtc.

(après le chœur)

La Princesse.

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Merci, les amoureux. Tenez, voilà pour votrechanson. (Elle donne sa bourse) Et maintenant, Mrle Baron … (en riant) Mon Dieu … quel drôle debaron … Vous plairait-il de nous faire conduire dansnos appartements.

Pietro.Quand vous voudrez, Princesse.

La Princesse.Tout de suite alors, puisque nous devons nousremettre en route demain au petit jour.

Pietro.Alors …

La Princesse.Venez, Messieurs.

Falsacappa, les arrêtant.Un instant … un instant! … Pardon, Princesse etvous tous, Mesdames et Messieurs de l’ambassadeEspagnole de Grenade.

Gloria Cassis.Qu’est-ce que c’est encore ?

Falsacappa.Ce n’est qu’un détail, mais il est important vous enprie, Madame et Messieurs de l’AmbassadeEspagnole de Grenade. Avant de vous coucher, ayezbien soin de mettre vos habits à la porte.

Gloria Cassis.Nous y mettrons nos bottes. Ce n’était pas la peinede nous arrêter pour cela.

Adolphe.Nous connaissons les usages.

Falsacappa.Pas seulement les bottes … Tout le costume,entendez vous, tout le costume. Vous avez biencompris, Madame et Messieurs de l’ambassadeEspagnole de Grenade. Devant chacune de vosportes vous trouverez une chaise et sur cette chaisevous mettrez vos habits … tous vos habits.

Gloria-Cassis.Pourquoi faire ?

Falsacappa.Mais enfin qu’on les prenne et qu’on les brosse.

Adolphe.C’est très délicat.

Gloria Cassis.Et c’est très aimable surtout de nous faire dire celapar un capitaine de carabiniers.

La Princesse.

Vous avez entendu, Adolphe. Vous mettrez voshabits …

Adolphe.Oui, Princesse.

Chœur, reprise.Madrid, princesse des Espagnes, etc.

Sortie de l’ambassade Espagnole de Grenade.

_____ Scène 15e _____

Falsacappa, Pietro, Barbavano, Carmagnola,Fiorella, Fragoletto.

Pietro.Je les comprends de plus en plus, tes vastes desseins,et je les admire. Ils mettent leurs habits sur leschaises.

Domino.Nous prenons les habits.

Barbavano.Nous nous en revêtons.

Falsacappa.Et nous allons à la place de l’ambassade Espagnolede Grenade toucher les 3 millions que l’ambassadeEspagnole de Grenade devait toucher et que nousemporterons, nous, dans le sac. Vous avez vu le sac.

Carmagnola.Le sac … le sac … mais sous quel prétexte y allons-nous, à la cour de Mantoue ?

Falsacappa.Nous y conduisons la jeune Princesse de Grenadequi doit épouser le prince, notre gracieux maître.

Barbavano.C’est très bien, mais où prenez-vous la Princesse deGrenade.

Fiorella.La Princesse de Grenade, mais ce sera moi.

Falsacappa.Oui, la princesse sera ma fille.

Carmagnola.Mais le Prince, quand il verra ta fille, verra bien quece n’est pas la jeune princesse.

Falsacappa.Au contraire …

Carmagnola.Comprends pas.

Falsacappa.

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Tu vas comprendre. Dans la valise de ce courrier decabinet que nous avons arrêté, il y avait un portrait,celui de la jeune princesse … Je l’ai mis dans mapoche et j’ai mis dans la valise le portrait de ma filleque j’avais justement sur moi.

Barbavano.Ça c’est malin.

Falsacappa.Donc le jeune prince en voyant ma fille, ne sera passurpris, puisqu’il verra l’original du portrait qu’ilaura reçu.

Tous.Vive Falsacappa !

Falsacappa.Alors, vous êtes contents … l’affaire vous va.

Carmagnola.D’autant plus qu’une fois à la cour là-bas il y aurasans doute de beaucoup à faire.Il fait un geste.

Falsacappa.C’est cela, n’est-ce pas, tater les poches … voler desmontres … (avec mépris) Des mouchoirs.

Carmagnola.Dame !

Falsacappa.Voilà ce que je ne veux pas, par exemple … Quandnous serons costumés en hommes du monde, si nousnous mettons à chiper des tabattières, ça nous feraremarquer.

Pietro.Tandis qu’en prenant les millions …

Falsacappa.Sans doute … il faut voler selon le rang la positionqu’on occupe dans la société … c’est élémentaire …Je vous en prie, Messieurs, dans une affaire commecelle-ci, pas de tabatières, pas de mouchoirs, et jevous promets le succès.

Pietro.A une condition, cependant.

Tous.Laquelle.

Pietro.C’est qu’une fois revêtus de nos nouveaux costumes,nous attraperons ce dont Mr Gloria Cassis parlaittout à l’heure : La Morgue Espagnole. Si nousattrapons la morgue Espagnole, tout est sauvé.

Scène 16e& dernière

Final.

_____ Scène 16e _____

Finale.

Falsacappa.Et maintenant, mes chers amisN’est-ce pas tout est bien compris ?

Tous.Oui grand chef, tout est bien compris

Falsacappa.Allons mes enfants, à l’ouvrage !- Tu seras la princesse ! - Et toi le petit page !

Fiorella.Je serai la princesse

Fragoletto.Et moi le petit page

FiorellaAh ! mon gentil page !

FragolettoAh ! ma noble dame

FiorellaDe tout votre cœur

FragolettoDe toute mon âme

FiorellaIl faudra m’aimer

FragolettoJe vous aimerai

FiorellaDe tout votre cœur

FragolettoDe toue mon âme !

FiorellaAh ! mon gentil page !

FragolettoAh ! ma noble dame !

PietroIls sont charmants !

FalsacappaIls sont charmantsMais ne perdons pas notre tempsA toi le précepteur ! - A vous, mes compagnonsLes trois seigneurs sans importance

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PietroJe le serai !

Les 3 brigandsNous le serons !

Tous les 4Comptez sur notre intelligence

Fiorella et FragolettoOui mais surtout si nous voulonsNe pas rater les millionsAttrapons (bis)Ou notre fortune s’envoleAttrapons (bis)Attrapons la morgue espagnoleAttrapons (bis)La morgue espagnoleEt les millions

TousAttrapons (bis) etc.

Les 4 petits brigands entrantVoilà voilà leurs habitsA la porte ils les avaient mis !Et pour vous obéir, chef, nous les avons pris

TousAux habits ! (bis)

CarmagnolaA moi ceci !

BarbavanoA moi cela

FragolettoLe pourpoint

Une femmeLe voici !

FiorellaLa jupe ?

Une femmeLa voilà

TousA moi ceciA moi cela !

PietroLe chapeau ?

Une femmeLe voici !

FalsacappaLes bottes ?

Une femmeLes voilà

Les hommesJ’ai mon costume. - J’ai le mien

FiorellaMais le costume, ce n’est rienL’important, vous l’entendez bienC’est quand nous aurons misCes habitsD’attraperD’attraper la morgue espagnole

Fiorella et FragolettoAttrapons (bis)Attrapons la morgue espagnole !

TousAttrapons (bis) etc.

FalsacappaDépêchez-vousHabillons nous !Puis sans trompette ni tambourNous nous en irons à la cour

TousTous sans trompette, etc.(puis piano)Tous sans trompette etc.

Le capitaine des carabiniers dans la caveQuand un brave

Les carabiniersQuand un brave

Le chefSe trouve enfermé dans une cave

TousUne caveDans une cave ou il y a du vinIl doit boireTant qu’il y en a du vin

FalsacappaVous tairez vous ! taisez-vous donc !

TousIl doit boire au son du claironTriple escadron !

Gloria Cassis et la princesse paraissantQuels sont ces cris ? quels sont ces chants ?Que se passe-t-il là dedans ?

PietroCe n’est rien (bis)

Gloria Cassis

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Comment, rien, nous entendons bien ?

Pipo s’élançant du soupiralA moi (bis) Holà (bis)

Falsacappa sautant sur luiLe diable emporte celui-là !

PipoDéfendez-moi contre Falsacappa !

Gloria Cassis et la princesse disparaissantFalsacappa !

Carmagnola et Barbavano sautant sur PipoSi tu dis un mot … tu nous comprends bien

Pipo qu’on entraîneJe ne dis rien ! (bis)

Falsacappa au soupirail(parlé) Voulez-vous bien vous taire, malheureux !Ça allait si bien ! … ça allait si bien ! …

L’ambassade espagnole entrantFalsacappa !Qui donc a parlé de ce brigand-là ?

Falsacappa à partFalsacappa ? Quelle idée ! - Il est là !

Les EspagnolsIl est là ?

FalsacappaIl est là !

Les EspagnolsIl est là ! Comment, il est là ?

FalsacappaNous n’voulions pas vous en parlerAfin de n’pas vous effrayerFalsacappa nous l’avons prisEt nous l’avons misDans la cave !

Gloria CassisEt vous ne nous disiez pas ça ?

FalsacappaOn est modeste quand on est brave

La princessePourrait-on le voir ?

Gloria CassisS’il n’y a pas d’danger

FalsacappaY en a pas du tout. Je m’en vas vous l’montrer

CarabiniersAllez chercher les prisonniers !

TousLe voilàLe terrible Falsacappa !

(Entrée des carabiniers)

ChœurNous sommes les carabiniersEtc.

La princesseIls se disent carabiniers

FragolettoNe vous étonnez pas PrincesseC’est le résultat de l’ivresse

Tous désignant le capitaineLe voilà !Le terrible Falsacappa !

Fiorella- 1 -Vois son visageEt comme il a bienL’air d’un sauvageEt d’un vrai vaurienVois quelle mineRegarde ses traitsComme on devineUn tas de forfaits !N’i, niC’est fini !Falsacappa, te voilà pris

Le capitaineQu’est-ce que tu dis ?

TousNi, niC’est fini !Etc.

Fragoletto- 2 -Dans les famillesIl porte l’effroi ;Les jeunes fillesSavent bien pourquoi.Sombre farouche,Il fait, par moments,Avec sa boucheDe sourds grognements !N,i, niC’est fini !Etc.

Campotasso paraissantOn vous trompe, Espagnols, ce n’est pas celui là

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Voilà le vrai Falsacappa !

FalsacappaA l’autre maintenant !

CampotassoFalsacappa, c’est toi ! - le nieras-tu brigand ?

FalsacappaJ’aurais voulus ne pas user de violenceMais vous m’y forcez ExcellencePar votre désobéissanceOui, c’est homme a dit vrai : mon nomMon nom la terreur duC’est Ernesto Falsacappa !

Entrée des brigands menaçant l’ambassade avecleurs tromblons

Les EspagnolsFalsacappa (bis)

FalsacappaJusqu’à demain matin vous les tiendrez en joueEt vous mes compagnons, en route pour Mantoue

Les carabiniers reprenant avec la plus grandetranquillitéNous sommes les carabiniersEtc.

- Ensemble -Brigands

EspagnolsTremblez

TremblonsTremblez car nous vous tenons

Tremblons car nous nous trouvonsTremblants

TremblantsAu bout de nos longs tromblons Au boutde leurs longs tromblons

BrigandsEt maintenant enfin partonsAllons toucher les millionsPartons nous nous habilleronsQuelque part dans les environs

PrisonniersDans la providence espéronsPeut être bientôt nous auronsLa douce satisfactionDe voir pendre ce grand fripon

CarabiniersNous sommes les carabiniresEtc.

Acte 3e______

Le Palais du prince de Mantoue_____

Une grande salle très riche, au lever du rideau unetable servie.

_____ Scène 1e _____

Le Prince de Mantoue, La Duchesse, la marquise,une dizaine de dames de la cour, c’est la fin dusouper. Un seul homme le prince, groupées autourde lui une douzaine de femmes.

Chœur :L’amour l’aurore paraît, pour fêter l’auroreSaluons la d’une chansonEt faisons durer, quelque temps encoreSa dernière nuit de garçonMa

Le princeVous aimez les chansons, je vais vous en dire uneQui s’applique à merveille à la situation

Les femmesQuoique vous nous chantiez fût-ce au clair de luneNous vous écouterons avec émotion

1er Couplet

Le PrinceJadis régnait un princeAussi beau que le jour

Les femmesAussi beau que le jour

Le princeLes dames de la provincePour lui mouraient d’amour

Les femmesPour lui mouraient d’amour

Le princeUne, la plus jolieMignonne et faite au tour

Les femmesMignonne et faite au tour

Le princePour passer son envieS’en fut droit à la cour

Les femmesS’en fut droit à la cour

Le princeToc ! toc ! toc !Beau prince aux cheveux bouclés

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Ouvrez-nous à l’instant mêmeToc ! toc ! toc !Ouvrez gentil prince, ouvrezA la femme qui vous aime

Les femmes entourant le princeToc, toc, toc, tocBeau prince aux cheveux bouclésEtc.

2e Couplet

Le princeVous ferez bien, madameDe vous en retourner

ToutesDe vous en retourner

Le princeL’objet de votre flammeVient de se marier

ToutesVient de se marier

Le princeA sa femme fidèleIl renonce aux amours

ToutesIl renonce aux amours

Le princeC’est très bien, dit la belleJ’repasserai dans huit jours

Reprise du refrainToc ! toc ! toc !

La DuchesseJe r’passerai dans huit jours.

La marquiseIl eut été plus sage encore de supprimer ces huitjours d’intervalle et de ne pas vous marier

La DuchesseA quoi bon se marier, quand on est jeune, quand onest gentil, quand on est prince ?

La marquiseQuand on peut nous aimer toutes …

La DuchesseEt être aimé par nous toutes !

Le princeJe sais bien, mais la raison d’état … vous ne tenezpas compte de la raison d’état …

La marquise

Qu’est-ce que cela nous fait, à nous, la raisond’état ? … nous ne savons qu’une chose, c’est quenous allons vous perdre

Toutes gémissantHi ! hi ! hi !

Le princeAllons, allons, ne pleurez pas, on tachera de vousconsoler … (il sonne, entre un huissier) qu’oncherche mon caissier central et qu’on lui dise que jeveux lui parler. (L’huissier sort)

Les femmesLe caissier ! … (le prince se retourne)

La duchesseEst-elle jolie, au moins, notre future souveraine

Le princePas mal, pas mal (il tire un portrait de sa poche)mais elle a un défaut qui est de rappeler unepersonne qui est beaucoup plus jolie qu’elle …(regardant le portrait et le leur montrant) Il y a troisjours, dans la montagne, je me suis trouvé face àface avec une jeune fille qui avait les mêmes traitsmais qui était bien autrement vive, bien autrementoriginale.

La marquiseOù est-elle … cette jeune fille ? …

Le princeOù elle est ? … je n’en sais rien … mais j’ai donnédes ordres, et j’espère bien qu’on me laretrouvera ! …

_____ Scène 2e _____

Les mêmes, le Caissier

Le Caissier entrouvant la porteVotre altesse m’a fait demander ? oh ! pardon ! …(il se sauve)

Le PrinceEh ! bien ! … Eh ! bien ! … (il va à la porte etappelle) hé ! la bas ! … hé ! … entrez donc,monsieur mon caissier central …

La duchesseVous n’êtes pas de trop …

Le CaissierMonseigneur … mes dames.

Le PrincePourquoi ne venez-vous pas quand on vous appelle ?

Le CaissierIl m’avait semblé que Monseigneur était occupé …alors …

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Le prince, riantQuelle mine vous avez … cet air fatigué … savez-vous bien, monsieur mon caissier central, que si jene vous connaissais pas, je croirais que vous avezpassé la nuit à faire la fête avec des demoiselles.

Le CaissierMoi, monseigneur, vous pourriez croire …

Le PrinceNon, je ne crois pas ; mais cette figure … ledésordre de votre toilette …

Le caissierJ’ai passé la nuit courbé sur mes chiffres.

Le princeOh ! alors …

Le caissierImaginez-vous, monseigneur … vous aussi mesdames, vous pouvez écouter … imaginez-vousqu’hier en faisant ma caisse … j’ai trouvé … deuxcentimes de trop … alors je me suis dit : je ne peuxpas aller me coucher comme ça … il faut que jeretrouve l’erreur … l’erreur se disait : il ne metrouvera pas, je suis si petite, moi, je répondais : Tuas beau être petite je t’attraperai … tu vas voir … etalors, la poursuite a commencé … Toute la nuit j’aicouru après mon erreur … elle se sauvait de registreen registre … je la poursuivais, j’étais là, toujours là,je ne lui laissais pas un instant de repos … à la fin,elle s’est laissé tomber sur un canapé et c’est làque …

Le princeQu’est-ce que vous dites ?

Le CaissierJe veux dire qu’à la fin, l’erreur s’est refugiée dansle grand livre, et c’est là que je l’ai pincée … mais lachasse avait duré toute la nuit … Je ne me suis pascouché … j’ai retrouvé l’erreur … et voilà,monseigneur, pourquoi j’ai ce matin le visage défaitet la mine éreintée …

Le princeJe sais que vous n’êtes pas un caissier ordinaire …vous êtes honnête … sommes-nous un peu riche ence moment ?

Le caissierSi nous sommes riches … je crois bien que noussommes riches …

Le princeC’est très bien … la marquise vous dira alors ce quecoûte son hôtel, vous paierez.

Le caissierAh ! ah !

Le princeVous paierez aussi une note que la duchesse a chezson couturier

La duchesseJ’aimerais mieux avoir l’argent et payer moi-même …

Le CaissierVous serez donc toujours la même, Mme laduchesse.

Le princeAutre chose, maintenant. La princesse de Grenadearrivera tout à l’heure, vous le savez, je ne tiens pasà ce que les gens qui l’accompagnent fassent ici unlong séjour. Vous aurez donc à leur remettre au plusvite les trois millions qu’ils doivent recevoir.

Le caissierTrois millions !

Le princeVous avez les fonds …

Le CaissierAltesse ! …

Le princeJe vous demande si vous avez les fonds !

Le CaissierSi j’ai les fonds ! … je crois bien que j’ai lesfonds … qu’est-ce que nous deviendrons si jen’avais pas les fonds …

Le princeA la bonne heure !

Le CaissierEt sera-t-il permis à un fidèle sujet d’ajouter unmot ?

Le princeSi vous tenez …

Le CaissierIl est neuf heures … en ce moment, sans doute, lajeune princesse entre en gare.

Le princeEt j’ai à peine le temps d’aller un peu réparer …mettre mon costume de satin blanc … merci, monmon caissier central … allons, mes dames allonsensemble, si vous le voulez jusqu’à la porte de monappartement, une fois là … par exemple …

La duchesseIl faudra nous séparer … mais souvenez vous quedans huit jours nous reviendrons frapper à cetteporte … et alors …

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Reprise du chœurToc ! toc ! toc !Ouvrez gentil prince ouvrezEtc.

(Le Prince sort avec toutes les femmes)

_____ Scène 3e _____

Le Caissier CentralPrenez garde, monseigneur, prenez garde … vousaimez trop les femmes … montez dans mes bureaux,voici la clef … ouvrez ma caisse, quel est ce mot,me direz-vous, le mot formé par les cinq lettres …ce mot, c’est volupté … ouvrez ma caisse, et vousn’y trouverez pas grand chose … vous y trouverez1283 f 21 et pas un fichtre avec … voilà où en sontles finances du pays de l’état … mais le reste, medirez-vous encore, le reste, misérable, qu’est-ce quetu as en fait du reste … eh ! bien mais je l’ai mangé,je l’ai mangé avec les femmes je me souviens encorede mon premier détournement … Léonore était là …près de moi elle me disais : je t’aime … moi quisavais ce que ça voulait dire, je lui disais : va-t-en …mais elle ne s’en allait pas. Je t’aime me repétait-elle, je t’aime … et elle se penchait vers moi, unemèche de ses cheveux me taquinait la joue, seslèvres effleurèrent mes lèvres, alors, je saisis mongrattoir … et je grattais pour la première fois !!Voila ce qui m’a perdu … c’est que j’avais un cœuret que j’avais un grattoir ! … toutes les fois que jevoyais une femme, mon cœur battait, et dès que lecœur battait le grattoir grattait … et alors degrattement en battement de battement engrattement … ah !

Couplets :

1Oh ! mes amours, ô mes maitressesPour vivre à vos genouxPour m’ennivrer de vos caressesDe vos baisers si douxPour me faire dire : je t’aimePar des chiens chiens chérisJ’ai donné mon argent, et mêmeL’argent du paysSi c’était à refaireJe le referaisVoila mon caractère

2eHélas ! j’ai mangé la grenouilleLa cour des comptes vaProbablement me chanter pouilleSous ce prétexte-làOn va vérifier ma caisseOn va tout découvrirEt je serai révoqué qu’est-ceQue je vais devenirCe sera dur, mais

Si c’était à refaireJe le referaisVoila mon caractère

___Demandez, demandez la jolie romance du caissierinfidèle … elle n’a été tirée qu’à cent milleexemplaires … mais si le premier tirage ne suffitpas, on en fera un autre … que devenir ? … L’hôtelde la marquise à payer … la couturière de laduchesse … et trois millions à donner àl’Espagne … et je la connais l’Espagne, elle lesréclamera ses trois millions … elle en a besoin …que faire ? (il tire un pistolet de sa poche) Me voilàarrivé au moment où il faut absolument … que jetrouve quelque chose pour ne pas être obligé d’enarriver là … (il remet le pistolet dans sa poche)voyons un peu … voyons … j’ai en caisse 1283 f21 … je dirai à la marquise et à la duchesse de separtager les 283 f 21 … de ce côté-là rien à craindre,mais l’envoyé espagnol … si cet enragé est unhonnête homme, je suis perdu … mais si c’est unhomme d’esprit … en lui offrant les mille francs quirestent (musique) qu’est-ce que j’entends ? … le sondes canons mêlé au bruit des castagnettes … ce sonteux ! … ce sont les Espagnols attention …

Entrent le prince de Mantoue avec les seigneurs

_____ Scène 4e _____

Chœur :Voici venir la jeune Espagnole princesse et sonpage !Elle s’avance avec fiertéSûre qu’elle est d’avoir le monopole d’obtenir votrehommageDe la Par sa grâce et par sa de la beauté

_____

Le princeVous avez les fonds ?

Le CaissierJe crois bien que je les ai, les fonds. (entre l’huissier)

L’huissierIl y a là des masques. Est-ce qu’il faut les laisserentrer ?

Le princeComment ! est-ce que ce n’est pas l’ambassade ?

L’huissierSi fait ! ils le disent, du moins …

Le princeEh bien, alors, faites entrer …

Reprise du chœurVoici venir etc.

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Entrée de l’ambassade. Ce sont les brigands qui ontreconstitué toute l’ambassade espagnole. Ils sont unpeu mieux accoutrés qu’auparavant, mais il fautqu’ils aient toujours un drôle d’air, Falsacappa etGloria Cassis, Pietro, précepteur, Bazile, Fiorella, enprincesse de Grenade. Fragoletto en petit page de laprincesse, portant sa queue, les autres brigands, enseigneurs espagnols … un peu les espagnols de laCourtille.

Le prince reconnaissant FiorellaC’est elle !

Fiorella reconnaissant le DucC’est lui !

Fragoletto surprisCe cri, ce cri, ce double criQue veut dire ce double cri ?

Les espagnols à partAh ! la bonne aubaineL’affaire est certaineNous pourrons sans peineLes dévaliser.Et puis sans scandaleFaire notre malleRaide comme balleEt nous la briser !!

Les gens de la courAh ! quelle ambassade !C’est une paradeUne mascaradeIls ont un bon chicVient-il de CastilleOu de la CourtilleCe joli quadrillePour un bal public

Le princeAh ! la BergeretteA qui sur l’herbetteJ’ai conté fleurettePardieu ! la voici …

Les Brigands Les ItaliensAh ! la bonne aubaine Ah ! quelle ambassade

Le princeMais cette jeunessePar quel tour d’adresseEst-elle princesseAujour d’aujourd’hui ?

Les Brigands Les ItaliensL’affaire est certaine C’est une parade !

FiorellaAh ! quelle surprisePristi ! je suis priseEt notre entreprise

Est en grand danger

Brigands Les ItaliensNous pourrons sans peine Une mascarade

FiorellaCar dans son ensembleCe prince il me sembleEn tous points ressembleA mon étranger !

Les Brigands Les ItaliensLes dévaliser ! Ils ont un bon chic !

FragolettoJe ne l’aime guèreCet air de mystèreEntre vous, ma chèreEt cet étranger

Fiorella et le PrinceAh ! quelle surprise !Etc. etc.

Reprise générale

Pendant la scène qui suit une note serait nécessairepresque à chaque ligne. Il faut que les voleursenlèvent toutes les montres et tous les mouchoirs.

Le prince à partC’est elle, je ne me trompe pas.

Fiorella bas à son pèreAllons-nous en, papa, allons-nous en tout de suite.

FalsacappaEt pourquoi ça ? …

FiorellaIl y a trois jours, ce jeune homme qui, grâce à moivous a échappé dans les rochers, c’est le prince, je lereconnais !

Falsacappa à partOh ! fichtre ! …

Fiorella à partEt lui aussi, me reconnaît … voyez, est-ce qu’il n’apas la figure d’un homme qui me reconnaît ?

Falsacappa basIl a la figure d’un homme qui ne te reconnaît qu’àmoitié … Dépêchons-nous de profiter de la moitiéqui nous reste (s’inclinant devant le prince quis’approche de Fiorella) Altesse ! …

Le princeComment êtes-vous venus seuls ? J’avais envoyé audevant de vous le baron de Campo-Tasso …

Pietro

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Campo-Tasso, c’est moi.

Le princeVous dites ?

PietroJe dis que c’est moi …

Falsacappa basMais non animal, tu ne l’es plus.

Pietro basAh ! tiens, mais c’est vrai, je suis le précepteur,maintenant …

FalsacappaM. de Campo-Tasso ? nous ne l’avons pas vu …n’est-ce pas, princesse, n’est-ce pas messieurs.

Le caissier à partCampo-Tasso disparu … si je disais que c’est lui quia vidé ma caisse …

PietroNous n’avons rencontré personne, mais comme nousavions l’adresse par écrit … ça ne nous a pasempêché d’arriver.

Le prince à partC’est bien elle, pourtant (haut) ainsi, mademoiselle,vous êtes la princesse de Grenade ?

FiorellaUn peu.

Le princeEt pourriez-vous dire, s’il vous plait, qui est-ce quirègne à Grenade, à présent ?

FiorellaCette bêtise, c’est papa.

Le prince à partElle a réponse à tout … (haut et montrant Fragoletto)Et monsieur …

FiorellaC’est mon page

Le princeAh !

FiorellaIl ne me quitte jamais !

Le princeJamais ?

FragolettoJamais !

Le prince à part

Cela s’accorde parfaitement avec les renseignementsqui m’ont été donnés sur la princesse … je ne saisplus que croire …

FalsacappaJe vous demande pardon, altesse, il y a un petitcompte à régler … il y a un petit compte …

Le PrinceTrois millions à vous donner …

FalsacappaJustement, j’ai apporté le sac …

Le Prince montrant le caissierVoici monsieur mon caissier central, il va montrerdans ses bureaux et vous apporter les trois millions

FalsacappaAh ! très bien M. le caissier central, vous avezentendu ?

Le caissier basMonsieur, je ne vous dirai qu’un mot je ne voudraispas faire de scandale, mais il y a un de vos seigneursqui vient de me prendre ma montre.

Falsacappa basLequel ?

Le caissier basC’est celui la un de ceux-là, là bas (Il montreBarbavano les brigands) vous me feriez plaisir en lalui redemandant

FalsacappaJe vais la lui reprendre, c’est plus simpleIl arrive près des brigands Barbavano reprend lamontre et en même temps allonge un formidablecoup de pied à Domino qui est en train de prendre unmouchoir.Qui est-ce qui a pris la montre ?

TousMais, chef …

FalsacappaQui est-ce qui a pris la montre ? (Ils rendent chacunune montre.) ah ! ah ! … c’est très bien ! Toi aussi,Pietro !

PietroJe ne le ferai plus.

Falsacappa (allant au caissier)La quelle est-ce ?

Le CaissierCelle-ci, monsieur … je vous remercie (à part)Drôles d’Espagnols !

Falsacappa (à part)

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Eh bien, mais puisque les trois autres personnes neréclament pas … (Il met les autres montres dans sapoche)

Falsacappa bas à DominoEt bien, drôle ! que je t’y prenne !

DominoA moi … touche

Le princeQu’est-ce que c’est ?

FalsacappaRien, mesdames, rien, messieurs, ce n’est rien … aucaissier Voici la montre, et maintenant si vousvoulez nous parlerons un peu …

Le caissierMonsieur, je monte dans mes bureaux je prends lestrois millions et je vous les apporte … mais d’abord,je ne vous dirai qu’un mot … je ne voudrai pas fairede scandale, mais voila ce qui arrive (il lui parle bas)

FalsacappaOh !

Le caissierC’est comme je vous le dis … ces messieurs et cesdames, on leur a pris un tas de choses

FalsacappaEst-ce vrai, mes dames, est-ce vrai messieurs ?

TousMais oui, c’est vrai on nous a dévalisés !

Le princeEn effet et moi-même …

FalsacappaNe craignez rien, Altesse, mes dames etmessieurs … c’est une simple farce, on va vousrendre tout ce qui vous a été dérobé.Il prend le chapeau de Pietro, et en tire une foule dechoses comme unà qui cela à qui cela, à qui la tabatière, à qui lamontre avec la chaine … la montre se remonte et lesaiguilles ne marchent pas … à qui ce bracelet … àqui le collier ? à qui ? … vous, madame, la bas, dansle fond je ne voudrai rien vous dire de désobligeant,mais il me semble que vous en reprenez bien plusqu’on ne vous en a pris à qui ça, à qui ça ?

Le caissier à partDrôles d’Espagnols !

entre un huissier

Le princeQu’est-ce que c’est ?

L’huissierMonseigneur on a des nouvelles de cette bande debrigands que vous avez ordonné de poursuivre.

Le princeAh ! j’y vais tout de suite … (à Fiorella) Je ne veuxpas vous séparer trop brusquement de ces messieurs,princesse, vous avez cinq minutes pour leur faire vosadieux … après cela on vous conduira dans vosappartements … J’irai vous retrouver … vous avezentendu messieurs … vous avez entendu …messieurs retirons-nous.

Le CaissierEt gare à nos poches

Reprise générale.

Tout le monde sort excepté Falsacappa, Pietro,Fiorella et Fragoletto, les trois brigands et les quatrefemmes.

_____ Scène 5e _____

Falsacappa, Pietro, Fiorella, Fragoletto, Barbavano,Domino, les quatre femmes, Carmagnola.

FalsacappaEt voila comment on se tire d’affaire quand on estmalin, eh bien, où sont nos hommes.

PietroIls auront suivi les seigneurs, afin de reprendre toutce que tu viens de restituer

FalsacappaLes imprudents ! cours après eux, digne Pietro, ettache au moins de les moderer

PietroJ’y cours.

FalsacappaIl est d’ailleurs inutile de les ramener ici jamais ilsne sauront s’y tenir, allez m’attendre sur la route, lesenfants et moi nous irons vous retrouver. Dès quej’aurai empoché les trois millions

Domino.Et nous on nous laisse là

ZerlinaOn ne nous invite pas

FiamettaC’est drôle

FalsacappaC’est votre faute aussi, misérables

BarbavanoAvec tout ça, les montres, vous les avez gardées.

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FalsacappaParlons pas de ça … on nous a laissé pour que nousfassions nos adieux à la princesse … Si vous voulez,nous les abrégerons. Vous allez remonter dans lescarrasses de la cour que l’on a mis à notredisposition.

CarmagnolaEt nous irons faire un tour.

FalsacappaVous irez m’attendre sur la grand’route … lesenfants et moi, nous irons vous retrouver dès quej’aurai empoché les trois millions.

PietroC’est entendu.

FalsacappaAllez, mes amis, allez.(Ils sortent)

PietroC’est entendu (il Pietro essaye de soulever lefauteuil)

FalsacappaEh bien ! qu’est-ce que tu fais là ?

PietroJe voulais voler ça … mais ça tient encore plus queje ne croyais

FalsacappaPeuh ! quatre fois je ne dis pas, mais par le tempsqui court ne perds pas ton temps honnête Pietro, etva où je t’ai dit

_____ Scène 6e _____

Falsacappa, Fiorella, Fragoletto.

FalsacappaTrois millions … et c’est à cause de ce petit-là …car enfin, s’il n’avait pas arrêté le courrier …

FragolettoDites donc, chef, puisque vous avouez que c’est àmoi que vous devez cette bonne aubaine … est-ceque vous ne trouvez pas qu’il est temps de parler dela récompense qui m’est dûe.

FalsacappaLa récompense, petit Fragoletto.

FragolettoOui, si nous en causions un peu, en attendant que lecaissier revienne.

FalsacappaTu l’entends, ô ma fille …

FiorellaOui, papa.

FalsacappaEt tu rougis.

FiorellaJe ne dis pas non.

FalsacappaDe pudeur.

FiorellaNaturellement, et d’autre chose aussi.

FalsacappaDe plaisir ?

FiorellaOui, papa.

FalsacappaAlors, c’est mon consentement que vous medemandez.

Fragoletto et FiorellaOui, papa.

FalsacappaEh ! bien, je vous le donne.

Les deuxMerci papa.

TrioFalsacappa à FiorellaMa fille !

FiorellaMon bon père !

Falsacapa à FragolettoEt toi mon fils aussi

FragolettoMon père

FalsacappaDans mes bras(il les tient dans ses bras)

FiorellaVous allez nous bénir, j’espère

FalsacappaVous bénir mes enfants, pourquoi pas

Fragoletto et FiorellaBenissez-nous bénissez-nousNous nous traînons à vos genoux

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FalsacappaVoila l’instant de s’émouvoirCourbez vos fronts dans la poussièreSur vous je vais faire pleuvoirLa bénédiction d’un père …Voila voilaEn avez vous assez comme ca ?

Fiorella et FragolettoDonnez-nous en encor papa

FalsacappaVoila voila …En avez-vous assez comme ça

Fragoletto et FiorellaAh ! comme il bénit bien papaMerci papa

FalsacappaVoila ! voila

Fragoletto et FiorellaMerci, papa.

FalsacappaPetit coquin

FragolettoQui ne l’aimerait pas en voyant tant de charmes

FiorellaMais, père vous pleurez

FalsacappaOui, mais c’est bon, les larmesAh ! que c’est bon ah ! que c’est bonRends la heureuse, aime la bienPetit vaurienAimes la bien

FragolettoQue je l’aime ! ah ! ne craignez rien

1Je t’aime tant ma chère femmeQue j’en deviens meilleur et sensFermenter au fond de mon âmeUn tas d’honnêtes sentimentsSi tu l’avais, toi, le courageD’être honnête mais l’auras-tu ?Nous lacherions le brigandagePour revenir à la vertuVeux-tu mamour, mamour veux-tuY revenir, à la vertuVeux-tu, veux-tu, dis, le veux-tu ?

Fiorella2Si mon père, si mon bon pèreVoulait renoncer au métierJ’abandonnerais la carrière

Et sans trop me faire prierQu’en dis-tu, papa, ce courageJe me le sens, te le sens-tu ?Lâcherais-tu le brigandagePour revenir à la vertuVeux-tu, papa, papa veux-tu ?

Fiorella et FragolettoVeux-tu papa, papa veux-tu ?Y revenir, à la vertuVeux-tu, veux-tu, dis, le veux-tu ?

FalsacappaLa vertu, mais c’est là mon rêveC’est ma plus chère ambitionJ’ai soif de considérationJ’en ai soif au point que j’en crève

Fiorella et FragolettoAlors, papa, c’est entendu …

FalsacappaOui, mes enfants, c’est convenu

Fiorella et FragolettoNous sommes tous d’accord, je crois

FalsacappaNous sommes d’accord tous les trois

Fiorella et FragolettoAh ! tous les trois

EnsembleTous les troisTous les troisTous les trois

FiorellaAu village retirons-nousLa vie agreste a tant de charmesAllons tous trois planter nos chouxLoin du monde et loin des gendarmes

EnsembleAu village retirons-nousEtc.

FalsacappaUn instant, pourtant, un instantSoyez vertueux mais plus tard

FiorellaOh ! papa ! pourquoi ce retard

FalsacappaCommençons par palper la sommeTrois millions en bons écus sonnantsTrois millions, mes chers enfantsN’empêchent pas d’être honnête hommePalpons la sommePalpons la somme

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FragolettoFaut-il d’abord palper la somme

FiorellaJe crois qu’il faut palper la somme

FalsacappaEh bien ! alors, palpons la sommeTrois millionsTrois millions

Fragoletto et FiorellaOui, mais dès que nous les auronsCes chers petits trois millionsCes millions

Tous les troisCes millions (bis)Ces millions

Reprise de l’EnsembleAu village retirons-nousEtc. etc.

Entre le caissier tenant dans le bras un énormeportefeuille il le montre à Falsacappa. Entrent laDuchesse et la marquise.

Le caissierBon nanan, ça

FalsacappaLes trois millions

La DuchessePrincesse, vos appartements sont prêts.

La marquiseNous allons vous y conduire, altesse …

Falsacappa basAttention, les enfants, il faut que dans une demie-heure, nous ayons filé d’ici, chacun de notre côté,nous nous retrouverons dans le souterrainmystérieux

FragolettoEt nous y ferons la noce …

FalsacappaA mort … adieu, princesse, adieu, Adolphe !

FiorellaAdieu, comte, adieu, venez mes dames.

_____ Scène 7e _____

Falsacappa, Le caissier.

FalsacappaA nous deux, maintenant.

FalsacappaSi vous tenez à voir mes titres.

Le caissierOh ! pour la forme seulement … Très bien très bien,ils sont parfaitement en règle

FalsacappaAlors ça va aller tout seul

Le caisier à partEt si c’est un honnête homme, je suis perdu, mais sic’est un malin, avec ce billet …

FalsacappaQu’est-ce que c’est que ça ?

Le caissierÇa, c’est un billet de mille francs, ça.

FalsacappaAh ! très bien, il faut encore 2 millions 999 millefrancs.

Le caissierVous dites qu’il faut encore … attendez …il commence à calculer après avoir placé le billet surla table à portée de Falsacappa, voyant qu’il ne leprend pas, il pousse le billet un peu et se replongedans ses calculs … à la fin, il se lève et dit a partavec surpriseIl n’a pas pris le billet …

FalsacappaJe vous disais que cela fait encore deux millions …

Le caisier999 mille francs, c’est parfaitement juste, vous vousêtes occupé de finances …

FalsacappaOui quelquefois … mais pardon, si nous parlions destrois millions.

Le caisierVous tenez à en parler

FalsacappaOui.

Le caissierParlons en, alors … nous disons que j’ai troismillions à vous remettre …

FalsacappaA la bonne heure

Le caissierEt vous les porterez à votre gouvernement, ces troismillions ?

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FalsacappaNaturellement

Le caissierEt qu’est-ce qu’il vous donnera là dessus votregouvernement ? rien du tout …

FalsacappaOh !

FalsacappaOh !

Le caissierNon, rien du tout … ils sont si ingrats lesgouvernements, ils s’occupent si peu des intérêts desparticuliers.

FalsacappaMais … ah ! ça …

Le caissierHeureusement que les particuliers s’en occupent,eux, de leurs intérêts …

FalsacappaQu’est-ce que vous dites ?

Le caissierJe dis que nous sommes là … deux bons enfants …vous ne ce côté de la table, vous êtes un bonenfant … moi de ce côté-ci de la table, je suis unautre bon enfant. Eh bien ne nous occupons pas de lacour de Grenade … occupons-nous de nous …qu’est-ce que ça nous fait à nous que la cour deGrenade ait ses trois millions ou qu’elle ne les aitpas.

FalsacappaAh ! ça, mais … ah ! ça, mais

Le caissierVoila un bon billet de mille francs et ce n’est pas unbillet de mille francs comme il y en a dans lesthéâtres … avec des bêtises écrites dessus … c’estun bon billet de mille francs (il disparaît sous latable)

FalsacappaEh bien, mais qu’est-ce qu’il fait … qu’est-ce qu’ilfait ?

Le caissier reparaissantIl n’a pas pris le billet … c’est un honnête homme

FalsacappaAh ! ça mais voyons, ces trois millions …

Le caissierChut …

Falsacappa

Comment … chut …

Le caissierTaisez-vous donc … je vais vous parler comme à unhonnête … je sais que vous êtes un honnête homme,maintenant

FalsacappaCes trois millions

Le caissierJe ne les ai pas

FalsacappaTu ne les a pas !

Le caissierNon, mais, attendez donc, on peut prendre desarrangements …

FalsacappaJe suis flambé … c’est un confrère …

Le caissierVoulez-vous des crocodiles empaillés ?

FalsacappaAh ! coquin !

Le caissierVoulez vous ma signature ?

FalsacappaAh ! voleur ! tu ne les as pas, les trois millions, il meles faut, cependant, entends-tu bien, il me les faut.

Entrent éperdus Pietro, Domino, CarmagnolaPerdus, chef, disent-ils toutes les portes du palaissont fermées.La porte du fond s’ouvre toute grande et paraissent :le prince en déshabillé, tous les personnages du 2eacte, carabiniers, italiens, espagnols, Gloria Cassis,Campo Tasso, la princesse, Adolphe, le chef descarabiniers, le précepteur, l’aubergiste, tous enfin.Ils entrent en scène en montrant Falsacappa. VoilaFalsacappa disent-ils qu’on s’empare de lui … onl’arrête.

Fin du morceau

Le prince au caissierVous n’avez pas donné les trois millions au moins.

Le caissierAh ! vous ne me connaissez pas, mon prince, non,non, je ne les ai pas donnés.

Le princeIl faudrait cependant essayer un peu de se donnerreconnaître au milieu de tout cela …Campotasso ? … où est-il, Campo-Tasso ?

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PietroCampo-Tasso, c’est moi.

Campo TassoComment, c’est vous … voulez-vous bien me voici

Gloria CassisEt me voici, moi Gloria-Cassis, et voici la princessede Grenade

La princesseEt voici mon page Adolphe

Le princeOh ! je sais … je sais … on m’a prévenu

Gloria CassisIl y a trois millions à me remettre

Le caissier à partBon, voila que ça va recommencer avec l’autre

Le princeCela regarde monsieur qui est mon caissier central

Le caissierOui, oui, cela me regarde … mais venez ici, j’aideux mots à vous dire

Gloria-CassisJe viens, je viens …

Le caissierJ’ai trois millions à vous remettre, mais que direz-vous … voyons (il tire le billet de mille francs) quedirez-vous d’un bon billet de mille francs

Gloria-Cassis prenant le billetCompris

Le chef des carabiniers montrant les brigandsEt ces gens … l’intention de votre altesse estprobablement de les faire pendre

Le princeOui certes, mais un instant cependant la pauvreprincesse de Grenade … où est elle, la pauvreprincese de Grenade ? … et qui était-ce ?

FalsacappaC’était ma fille … Tout ça était très bien combiné,mais qu’est-ce que vous voulez, c’est manqué

Le princeEt qu’est-elle devenue, ta fille ?

Finale

En ce moment, on entend au dehors la chanson deFiorella au 1er acte, je suis la fille du bandit, ellereparaît dans son costume de brigande … la carabinesur l’épaule … accompagnée de Fragoletto, en petit

brigand. Prince, dit-elle, je t’ai sauvé la vie … je tedemande la grâce de mon père et de sescompagnons.

Pardon général

Fin